La saga Samir

La saga Samir

Le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI) a rendu son verdict concernant l’affaire Samir : une indemnisation de 150 millions de dollars a été accordée à Corral Holding au lieu des 2,7 milliards réclamés. Ce verdict met en lumière non seulement les failles de la gestion privée, mais également l'intégrité du processus judiciaire international face aux demandes exorbitantes.

Rappelons les faits : l’entreprise Samir, naguère pilier de l’économie marocaine, s’est vue paralysée et entraînée dans une spirale de dettes sous la direction de Corral Morocco Holding, propriété de l’homme d’affaires saoudo-éthiopien Mohammed Al Amoudi.

Cette gestion a mené à la cessation des activités de la raffinerie en 2015, entraînant la perte de milliers d’emplois et un préjudice économique majeur. La demande de compensation astronomique de 2,7 milliards de dollars formulée par Al Amoudi auprès du CIRDI semblait donc, à bien des égards, une tentative désespérée d’obtenir un «golden parachute» après des années de gestion désastreuse. Le Maroc, dans sa défense, a brillamment exposé les efforts continus du gouvernement pour soutenir l'entreprise, malgré les difficultés financières et les défaillances de gestion de Corral. En accordant moins de 6% de la somme réclamée, la décision du CIRDI ne peut être perçue que comme une validation des efforts du Maroc et une réprimande cinglante contre les pratiques d’affaires peu scrupuleuses d’Al Amoudi. Le Royaume va-t-il cependant en rester là ?

Selon la ministre de l’Économie et des Finances, Nadia Fettah, le Maroc, qui a pris acte de cette décision, étudie toutes les possibilités, y compris le recours en annulation devant le CIRDI. C’est dire que ce chapitre sombre de l’histoire désastreuse de la Samir n’est pas encore définitivement clos. Il le faudrait pourtant, pour passer à autre chose et offrir de nouvelles perspectives à tous ses salariés désabusés. Un nouveau projet serait à l’étude pour donner une nouvelle vie au site du raffineur à Mohammédia.

Une chose est sûre : l'absence d'un raffineur national, suite à la fermeture de la Samir, laisse le Royaume en position de vulnérabilité, dépendant des fluctuations des marchés internationaux pour l'approvisionnement en essence, diesel et autres produits dérivés du pétrole. Et en ces temps de turbulences géopolitiques, la question de la sécurité énergétique reste un sujet de préoccupation majeure. Pour le Maroc, pays dépourvu de ressources pétrolières et grand importateur d’énergie, l’instauration d’une capacité nationale de raffinage représente donc non seulement une démarche stratégique, mais une impérieuse nécessité.

Qui permettra tout au moins de réduire une dépendance qui peut s’avérer coûteuse et risquée, notamment dans le contexte actuel où chaque crise internationale peut perturber l’approvisionnement. La pandémie liée à la Covid-19 et la guerre russo-ukrainienne en sont la preuve. Un raffineur national ne serait donc pas juste un bouclier contre les caprices géopolitiques, mais un puissant levier économique. 

 

Par F.Z Ouriaghli

 

 

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