Fatima Ouriaghli, Directrice de publication de Finances News Hebdo
Un «système» très atomisé, caractérisé par une multiplicité d’actions inefficaces qui donnent le sentiment d’une anarchie un brin organisée : c’est ainsi que l’on peut apprécier la protection sociale au Maroc. D’ailleurs, l’économiste Mohamed Berrada a la conviction qu’il n’existe pas de système. Mais plutôt «une suite d’actions ou de programmes menées par les pouvoirs publics dans le temps, en fonction des nécessités du moment, pour une population déterminée, dans des circonstances particulières et avec un cadre juridique et des règles de fonctionnement distincts».
Autrement dit, tous les ingrédients sont réunis pour alimenter une action publique inefficiente et un «système» de protection sociale foncièrement inéquitable. Dans son discours du 29 juillet dernier lors de la Fête du Trône, le Roi Mohammed VI a parfaitement résumé la situation en ces termes : «(…) il est insensé que plus de cent programmes de soutien et de protection sociale, de différents formats et se voyant affecter des dizaines de milliards de dirhams, soient éparpillés entre plusieurs départements ministériels et de multiples intervenants publics. En fait, ces programmes empiètent les uns sur les autres, pèchent par manque de cohérence et ne parviennent pas à cibler les catégories effectivement éligibles».
C’est donc pour mettre un point final à ce capharnaüm que se sont tenues à Skhirate, les 12 et 13 novembre, les premières Assises nationales sur la protection sociale. Objectif :
mettre enfin en place un système intégré, cohérent et surtout efficace, afin d’en faire réellement une composante essentielle du nouveau modèle de développement.
Car, malgré tout le dispositif mis en place et les milliards de dirhams mobilisés, beaucoup de Marocains échappent encore, malgré eux, aux filets sociaux. Les chiffres publiés à ce titre par le haut-commissariat au Plan (HCP) sont éloquents. Sur une population estimée, en 2017, à près de 34,8 millions, seuls 16,2 millions de Marocains (46,6%) ont une couverture médicale. Au niveau de la population active occupée (10,7 millions de personnes), environ 4,6 millions (42,7%) disposent d’une couverture médicale. Par ailleurs, seuls 20,9% des actifs occupés âgés de 15 ans et plus sont couverts par un système de retraite, note le HCP.
Reste à savoir maintenant si ces premières Assises permettront d’aller au-delà des diagnostics formels et de bâtir enfin un système de protection sociale en phase avec les aspirations de développement du Royaume. On attend de voir.
Mais l’on ne doute pas qu’il y aura des avancées tangibles, d’autant que cela émane de la volonté royale. ■