McKinsey à travers sa Practice “Global Banking & Securities” vient de publier son rapport annuel phare sur le secteur bancaire, intitulé : L’heure de la dernière chance ? Le temps est venu d’entreprendre des initiatives audacieuses pour préparer le prochain cycle (The last pit stop ? Time for bold late-cycle moves)
McKinsey observe que le secteur bancaire approche de la fin du cycle économique actuel dans une situation assez complexe. Sur 1000 banques étudiées au niveau mondial, près de 60% ne génèrent pas un rendement couvrant leur coût du capital et sont valorisées en dessous de leur valeur comptable.
Au niveau mondial, la croissance des banques ralentit en volume et en PNB : croissance des prêts de 4 % en 2017-2018 - la plus faible des cinq dernières années et inférieure de 150 points de base à celle du PIB nominal. Les courbes de rendement se tassent également. Et, bien que les valorisations fluctuent, la confiance des investisseurs dans les banques s'affaiblit une fois de plus. Pendant ce temps, l’impact disruptif du digital sur l’ensemble de l’industrie se poursuit sans relâche.
François Jurd de Girancourt, Directeur associé et responsable Institutions Financières pour l’Afrique - bureau de Casablanca de McKinsey : « L’Afrique se porte mieux, avec une croissance attendue du PNB de 8,5% p.a. sur les prochaines années, avec cependant des fortes différences entre les pays et entre les segments de clientèle. Savoir où jouer est primordial ».
« La différence entre les banques gagnantes et les perdantes s’explique à 70% par la géographie. Le second critère de performance le plus important est l’échelle relative de chaque banque dans ses marchés – que ce soit un pays, une région ou un segment de clientèle ».
Bien que les ROEs restent meilleur en moyenne en Afrique (moyenne mondiale a 8,9%, Le Maroc a 9,5% en moyenne, l’Afrique du Sud a 16% et l’Egypte a 20%) les banques Africaines font face aux mêmes tendances : diminution des marges, augmentation du churn, concurrence accrue aussi par l’entrée de nouveaux acteurs, souvent encouragée par les régulateurs.
Ces tendances sont également observées au Maroc, le pays connait une situation hybride entre l’Afrique et l’Europe avec un ralentissement de la croissance du secteur bancaire, en volumes et en PNB (TCAM de 7,0% p.a. entre 2012-2014 vs. 1,7% p.a. entre 2014-2018). Les ROE ont baissé de 120 points de base sur les 5 dernières années. Cette baisse de rentabilité est causée par des pressions sur les marges et une hausse des charges d’exploitation, et ceci malgré la stabilisation du coût du risque.
McKinsey identifie quatre recommandations en fonction du profil de chaque banque
1. Les leaders du marché. Ils représentent un peu plus de 20 % des banques dans le monde et capturent près de 100 % de la valeur ajoutée de l'ensemble du secteur. Impératif : Réallouer des capitaux et des ressources pour investir intelligemment dans l'innovation et se développer davantage pour le prochain cycle.
2. Les résilients. Ce sont des banques qui ont une rentabilité de fonds propres égale au coût du capital, et qui ont une véritable franchise sur leur pays et/ou segment. Impératif : Se concentrer sur l'expansion au-delà de leur clientèle directe et produits de base par le biais de l'innovation et d’initiatives pouvant impacter l’écosystème dans son ensemble.
3. Les suiveurs. Environ 20 % des banques n'ont pas atteint leur taille et sont plus faibles que leurs homologues, malgré une dynamique de marché favorable. Impératif : Agir rapidement pour gagner en échelle là où ils sont les meilleurs et réduire radicalement les coûts.
4. Les challengés. Un peu plus de 35 % des banques dans le ‘monde sont contraints par leur échelle insuffisante et souffrent de contextes marchés défavorables. Impératif : L'urgence est extrême. Pour survivre à un ralentissement économique, les options inorganiques semblent être le seul recours viable.
Reda Kabbaj, directeur de projet et leader du centre de compétence bancaire en Afrique du Nord : « En Afrique, où il existe en en général entre 15 et 25 banques par pays, qui ont pour la plupart un modèle de banque universelle, l’enjeu est de choisir. Se concentrer sur des segments, des produits pour atteindre la taille critique »
« Au Maroc, où le ralentissement du secteur a commencé. Les banques doivent se transformer opérationnellement pour libérer de la marge de manœuvre. En parallèle, elles doivent différencier d’avantage leurs modèles de couverture et améliorer le niveau de service pour augmenter les taux d´équipements par client ».
Le rapport examine en détail les leviers audacieux et pratiques pour améliorer concrètement la performance et investir en vue du prochain cycle économique, en particulier ceux qui peuvent être exécutés dans un délai de deux à trois ans.