PARIS (Reuters) - L’économie mondiale devrait connaître cette année sa croissance la plus solide depuis 2011, prévoit l’OCDE en soulignant toutefois qu’une escalade protectionniste pourrait nuire à des perspectives économiques qui restent favorables.
Dans leurs prévisions économiques intérimaires publiées mardi, les économistes de l’Organisation de coopération et de développement économiques tablent sur une croissance mondiale accélérant à 3,9% cette année et l’an prochain (après 3,7% en 2017), tout comme leurs homologues du FMI.
La révision à la hausse par rapport aux précédentes estimations de l’OCDE publiées en novembre - +0,2 point en 2018 et +0,3 point en 2019 - a surtout été motivée par les retombées des baisses d’impôts prévues aux Etats-Unis et la perspective d’une politique budgétaire plus expansionniste en Allemagne.
D’après l’OCDE, la reprise de l’investissement des entreprises devrait alimenter le rebond du commerce international, avec des volumes attendus en hausse de plus de 5% cette année. Autant d’éléments qui, combinés à la progression de l’emploi, contribuent à une reprise de plus en plus généralisée.
“Nous pensons que l’économie va rester plus solide pour les deux prochaines années”, a déclaré à Reuters Alvaro Pereira, chef économiste de l’OCDE par intérim.
“Nous revenons à des circonstances plus normales que celles que nous avons connues au cours des dix dernières années”, a-t-il ajouté.
Mais la perspective d’un regain de protectionnisme, dans le sillage de la décision Donald Trump d’imposer de nouvelles taxes douanières sur les importations américaines d’aluminium et d’acier, constitue un risque majeur, souligne l’OCDE en invitant les pays concernés à éviter toute escalade.
“Cela pourrait évidemment compromettre la reprise. Nous pensons que cela représente un risque significatif et nous espérons qu’il ne se matérialisera pas car cela pourrait être assez préjudiciable”, a dit Alvaro Pereira.
L’OCDE s’inquiète aussi du niveau élevé d’endettement des acteurs économiques dans de nombreux pays, sources de vulnérabilités financières. Sans compter que la normalisation progressive des politiques monétaires pourrait entraîner une plus grande volatilité des taux de change et des flux de capitaux, en particulier dans les économies émergentes.
Dans le détail, l’OCDE a révisé en nette hausse ses prévisions de croissance pour les Etats-Unis, la France et l’Allemagne.
La première économie mondiale devrait enregistrer une croissance de 2,9% en 2018 et de 2,8% en 2019 (contre 2,5% et 2,1% précédemment), la contribution des retombées de la réforme fiscale étant estimée entre 0,5 et 0,75 points de pourcentage sur chacune des deux années.
Cette situation devrait probablement conduire la Réserve fédérale à procéder à quatre hausses de taux cette année sur fond de remontée de l’inflation, prédit Alvaro Pereira.
L’OCDE évoquait jusqu’alors un scénario de trois hausses de taux en 2018.
Au sein de la zone euro, l’Allemagne continuerait d’afficher une croissance solide, soutenue par l’assouplissement budgétaire prévu dans l’accord de coalition entre la CDU-CSU et le SPD.
L’économie allemande devrait cependant ralentir, avec une croissance attendue à 2,4% cette année (+0,1 point par rapport aux prévisions de novembre) et à 2,2% en 2019 (+0,3 point), après 2,5% en 2017.
L’OCDE est également plus optimiste pour la France, qui devrait selon elle combler une partie de son retard par rapport à la moyenne européenne grâce aux réformes entreprises en ce début de quinquennat d’Emmanuel Macron.
L’économie française, qui a affiché une croissance de 2,0% sur l’année écoulée, devrait accélérer cette année à 2,2% - un niveau inédit depuis 2007 et supérieur de 0,4 point aux précédentes prévisions - avant de ralentir à 1,9% (-0,2 point) l’an prochain.
Globalement, la croissance de la zone euro s’établirait à 2,3% cette année et 2,1% l’an prochain, ce qui correspond à une révision à la hausse de 0,2 point dans les deux cas.
A l’inverse de la tendance générale, le Royaume-Uni devrait voir sa croissance ralentir et rester à la traîne de la moyenne du G20, sur fond d’inquiétudes persistantes sur la définition de ses futures relations avec l’Union européenne après le Brexit.
De 1,7% en 2017, sa croissance passerait à 1,3% cette année - un chiffre revu en hausse de 0,1 point - et à 1,1% en 2019, sans changement par rapport aux prévisions de novembre.
L’OCDE est en revanche plus positive pour le Japon en 2018, avec une prévision de croissance revue en hausse de 0,3 point à 1,5%. Celle de 2019 n’est relevée que de 0,1 point à 1,1%.
En ce qui concerne les pays émergents, l’OCDE a légèrement révisé ses anticipations pour la Chine en 2018 (+0,1 point à 6,7%) et maintenu sa prévision d’une croissance de 6,4% en 2019.
Avec des prévisions revues en hausse, l’Inde passerait devant la Chine avec une croissance attendue à 7,2% cette année (+0,2 point) et à 7,5% en 2019 (+0,1 point).
L’OCDE, qui se montre plus optimiste pour le Brésil (+0,3 point à 2,2% en 2018 et +0,1 point à 2,4% en 2019), est en revanche plus réservée sur la Russie, avec une prévision revue en baisse de 0,1 point, à 1,8% en 2018 et une croissance attendue à 1,5% en 2019, sans changement par rapport aux prévisions de novembre.