Sahara marocain : «Le régime militaire algérien a fait de la marocophobie une doctrine d’Etat»

Sahara marocain : «Le régime militaire algérien a fait de la marocophobie une doctrine d’Etat»

Alger espère un veto russe ou chinois pour faire perdurer le conflit du Sahara marocain. Entretien avec Mohamed Belmir, professeur de sciences politiques à l’Université Hassan II de Casablanca.

 

Propos recueillis par C. Jaidani

Finances News Hebdo : Comment jugez-vous l’évolution du dossier du Sahara à l’ONU ?

Mohamed Belmir : Comparativement à d’autres dossiers abordés par les Nations unies auparavant, celui du Sahara a pris beaucoup de temps pour être réglé. La réunion du 30 octobre du Conseil de sécurité est très attendue et sera cruciale. Le vote devrait vraisemblablement être en faveur de la position marocaine, entérinant l’option de l’autonomie sous souveraineté marocaine proposée en 2007. Cette résolution va également redéfinir les nouvelles attributions de la Minurso. Le Royaume consacre ainsi le succès d’un processus diplomatique qui s’est intensifié ces dernières années. Ce processus a permis, au fur et à mesure, la reconnaissance par plusieurs Etats de la marocanité du Sahara, dont notamment trois membres permanents du Conseil de sécurité (Etats-Unis, France, Grande- Bretagne). Alger espère un véto de la Russie ou de la Chine pour que la résolution soit bloquée et que le conflit perdure. Mais lors des derniers votes du Conseil de sécurité, les deux pays ont manifesté leur neutralité. En revanche, Alger reste fortement attachée à l’idée de l’organisation d’un référendum d’autodétermination qu’elle défend âprement. Toutefois, cette option s’est avérée irréalisable à cause des difficultés rencontrées par la Minurso pour identifier le corps électoral. De nombreux résidents des camps de Tindouf n’ont aucun lien avec la zone du conflit. La plupart des habitants de cette zone sont originaires du sud de l’Algérie, de la Mauritanie et d’autres pays du Sahel. C’est pour cette raison que le régime algérien a refusé de les recenser. Son objectif était de gonfler le corps électoral avec une population qui lui est fidèle. Il espère, au cas où un référendum serait organisé, que cette population vote logiquement pour l’indépendance. Ainsi, l’Algérie aura un Etat sous sa tutelle et, par ricochet, un accès direct à l’Océan atlantique qui est son grand rêve. Son objectif était également de couper les liens du Maroc avec ses racines africaines afin d’assurer sa domination régionale.

 

F. N. H. : Pourquoi Alger cherchet-elle à faire perdurer ce conflit ?

M. B. : Il faut comprendre que le régime militaire algérien a fait de la marocophobie une doctrine d’Etat. Cette obsession et la haine envers le Maroc ont commencé avec la Guerre des sables en 1963, et se sont accentuées avec le conflit du Sahara qui a été élevé au niveau de cause nationale. L’Algérie est devenue un acteur majeur dans ce conflit. Elle a parrainé pendant 50 ans les séparatistes du polisario, leur a fourni un soutien logistique de taille en armement, sans compter un soutien diplomatique des plus acharnés. Toutes ses chancelleries à l’étranger ont été mises à la disposition de cette cause. Chaque année, un budget colossal est consacré à la Défense, dont une grande part est détournée pour financer et entretenir les milices séparatistes.

 

F. N. H. : Un haut conseiller de Trump a affirmé qu’un accord de paix pourrait être conclu entre le Maroc et l’Algérie d’ici 60 jours. Pensez-vous que c’est faisable ?

M. B. : Il est difficile d’imaginer les Algériens mener des négociations avec le Royaume pour aboutir à un tel accord. Alger a rejeté en bloc toutes les tentatives de la «main tendue» que le Roi a formulées dans plusieurs de ses discours officiels. Dans sa politique, Alger a constamment besoin d’un ennemi extérieur pour justifier les grosses dépenses pour la Défense et le despotisme exercé sur la population pour des raisons de sécurité nationale. Mais les pressions américaines peuvent produire leurs effets et inciter les dirigeants algériens à s’inscrire dans un processus d’apaisement et de rapprochement avec le Royaume. Washington a de tout temps affirmé que la stabilité de l’Afrique du Nord est favorable à ses intérêts stratégiques. Différents risques de sécurité planent dans cette zone, dont celui du terrorisme, qui peuvent avoir un impact sur les alliés des Américains, notamment ceux de l’Europe du Sud. Le rétablissement des relations entre l’Algérie et le Maroc permettra d’assurer à terme l’intégration du Maghreb. Les pays de la région ont plusieurs éléments de complémentarité et ont intérêt à entretenir un bon voisinage. 

 

 

 

 

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