Les taxes parafiscales constituent une catégorie de prélèvements obligatoires.
Elles permettent à l’organisme affectataire d’être autonome dans l’exercice de ses missions, en bénéficiant d’une ressource moins susceptible d’ajustement budgétaire qu’une dotation traditionnelle. Leur débudgétisation rend le contrôle pernicieux, se traduisant parfois par des dysfonctionnements au sein des établissements affectataires. L’Etat est intervenu récemment pour exiger le remboursement de l'excédent issu du produit des taxes parafiscales au Trésor et depuis, on commence à parler au Maroc de subventions remboursables. Détails !
Au moment où tous les discours convergent vers la nécessité de la soutenabilité des finances publiques, de la transparence financière et de la reddition des comptes, n’est-il pas plus judicieux de revoir certains aspects de la fiscalité, en l’occurrence les taxes parafiscales ou taxes affectées ?
De l’avis des experts, la parafiscalité semble répondre à des besoins d’efficacité, de proximité et de spécialisation. Les taxes parafiscales constituent une catégorie de prélèvements obligatoires présentant certaines caractéristiques : elles sont perçues dans un intérêt économique et social, et sont affectées à un organisme déterminé autre que l’Etat, les collectivités territoriales … c’est-à-dire des établissements publics. Elles permettent à l’organisme affectataire d’être autonome dans l’exercice de ses missions, en bénéficiant d’une ressource moins susceptible d’ajustement budgétaire qu’une dotation traditionnelle. Nonobstant cela, elles sont pointées du doigt parce qu’elles n’obéissent pas au principe de l’unité budgétaire qui stipule que l’ensemble des recettes et des dépenses soient listées dans un seul document. Du coup, à cause de leur multiplicité, leur contrôle s’avère pernicieux, avec toutes les conséquences qui peuvent en découler. Sous d’autres cieux, notamment l’Hexagone, la faiblesse du cadre initial, caractérisé par un très grand renvoi au pouvoir réglementaire, a poussé le législateur à rendre ce régime plus transparent et à mieux encadrer la création de taxes parafiscales. «A plusieurs reprises, le Conseil constitutionnel avait jugé qu’aucune règle ni aucun principe de valeur constitutionnelle n’interdisait d’affecter le produit d’une imposition à un établissement public. Il refuse en revanche de se prononcer sur les effets du point de vue du contrôle parlementaire, d’une débudgétisation», lit-on dans le rapport sur les contours juridiques des taxes affectées. Depuis, les taxes affectées sont annexées aux Lois de Finances.
Quelles critiques à l’encontre du régime parafiscal ?
«Au Maroc, parmi les premiers établissements ayant bénéficié de ressources issues de la parafiscalité, on cite à titre indicatif l’EACCE, le CMPE, la Maison de l’artisan, l’ONMT, la SNRT… Et si les textes régissant les taxes ont transité par les instances législatives, l’enveloppe affectée et les dépenses y afférentes ne passent pas par le même canal», explique Houssifi El Houssaine, expert-comptable DPLE. «Elles échappent donc aux procédures légales et réglementaires prônées en matière budgétaire», tient-il à préciser. Un constat que partage Mohamed Hdid, expertcomptable et commissaire aux comptes.
Les taxes parafiscales sont également soumises à d’autres critiques. Au-delà de la faiblesse de leur encadrement juridique, la première remarque adressée aux taxes parafiscales porte sur l’insécurité juridique résultant de leur statut. La deuxième remarque est relative à leur instabilité dans le temps. Des décrets de renouvellement périodiques sont donc nécessaires pour assurer leur pérennité. «Lorsque ces décrets étaient adoptés en retard, les taxes étaient perçues illégalement pendant plusieurs mois, ce qui pouvait être une source de contentieux», apprendon dans le même rapport.
Une autre remarque et pas des moindres a trait au faible contrôle de ces taxes. Cela se traduit par des dysfonctionnements au sein des établissements affectataires. Ce caractère d’opacité est confirmé par E.H. Houssifi : «Fidèles à leur nature dans plusieurs cas, ces ressources dépassent parfois les besoins de ces établissements affectataires et génèrent une trésorerie pléthorique». D’après lui, pour parer à cette situation, l’Etat est intervenu récemment pour exiger le remboursement de l'excédent au Trésor et, depuis, on commence à parler au Maroc de subventions remboursables. Cet acte a été interprété par l’administration fiscale comme une répartition de dividendes soumise à la fiscalité de capitaux. Une autre paire de manche !
Interrogé sur la constitutionnalité desdites taxes en marge du Colloque sur les finances publiques tenu récemment à Rabat, le trésorier général du Royaume affirme : «En effet, il existe des taxes parafiscales, d’autres votées au niveau des assemblées régionales et qui sont régies par la réglementation en vigueur. Il s’agit de redevances pour des services rendus, mais qui sont réglementées». Une déclaration qui laisse deviner que la rationalisation des taxes affectées et leur présentation en annexe à chaque Loi de Finances, comme c’est le cas en France, n’est pas pour sitôt.
S. Es-siari