Le Comité de Coordination et de Surveillance des Risques Systémiques (CCSRS) s’est réuni pour sa traditionnelle rencontre semestrielle afin d'évaluer les risques systémiques qui pourraient peser sur la stabilité financière du Maroc.
Le CCSRS, se compose, rappelons-le, des représentants de Bank Al-Maghrib, de l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS), de l’Autorité marocaine du marché de capitaux (AMMC) et du ministère des Finances.
A l’issue de l’analyse de la situation du système financier au regard des tendances économiques et financières, observées et attendues, le Comité a dégagé les principaux constats suivants :
Les risques macroéconomiques se maintiennent globalement à un niveau modéré dans un contexte national et international qui appelle à la vigilance, estime le CCSRS.
Au plan international, la conjoncture demeure peu favorable sous l’effet notamment de la persistance des tensions commerciales et géopolitiques, des incertitudes entourant l’issue du Brexit ainsi que d’une volatilité accrue des marchés financiers.
Au plan des comptes extérieurs, le déficit du compte courant s’est détérioré en 2018, avec toutefois des perspectives d’amélioration en 2019 et 2020. Pour leur part, les réserves internationales nettes se sont établies à 230,7 milliards de dirhams couvrant l’équivalent d’un peu plus de 5 mois d’importations de biens et services. Elles devraient, en outre, selon les prévisions de Bank Al-Maghrib, maintenir cette couverture sur l’horizon de prévision.
Sur le plan intérieur, la croissance nationale a décéléré à 3%, recouvrant une progression limitée des activités non agricoles à 2,6% et une hausse de la valeur ajoutée agricole à 4% après 15,2% en 2017. Elle devrait ralentir en 2019 à 2,8% avant de rebondir à 4% en 2020 à la faveur notamment, d’une reprise marquée des activités non agricoles. S’agissant des finances publiques, le déficit budgétaire s’est accentué à 3,7% du PIB en 2018 ; il devrait se creuser en 2019 pour s’établir à 4,1% avant son allégement à 3,8% en 2020. Parallèlement, le taux d’endettement du Trésor, quoiqu’en légère hausse, devrait s’infléchir à compter de 2020.
L’étude que réalise annuellement Bank Al-Maghrib depuis 2013 sur les délais de paiement inter-entreprises a porté cette fois-ci sur un échantillon d’environ 74.400 entreprises non financières privées et publiques dont les données ont été fiabilisées.
Il ressort de cette nouvelle étude que les délais de paiement des créances inter-entreprises continuent d’afficher des niveaux inquiétants, notamment pour la TPE et certains secteurs d’activité.
Ce constat appelle à la poursuite des efforts engagés par les autorités publiques et à une mobilisation collective du tissu économique, notamment le secteur privé, en vue d’atténuer cette problématique durant les prochaines années.
Dans un contexte de coût élevé du risque de crédit, le secteur bancaire est parvenu à préserver sa rentabilité et à consolider sa solidité financière grâce notamment à la diversification de ses activités sur les plans sectoriel et géographique. Les banques continuent d’afficher des ratios de solvabilité supérieurs aux minimas réglementaires et s’avèrent résilientes aux stress-tests simulant une détérioration sévère des conditions macroéconomiques. Les risques de concentration sur les gros débiteurs et de taux d’intérêt auxquels sont exposées les banques continuent de faire l’objet d’un suivi rapproché. Une attention est également accordée aux risques émergents, notamment, les cyber-risques.
Le secteur des assurances continue de montrer des signes de solidité, en dépit de l’augmentation de la sinistralité ayant entrainé une baisse des résultats techniques. Le volume global des primes a atteint un montant de 43,1 milliards de dirhams, en progression de 6%. Malgré la baisse des résultats nets, le rendement des capitaux (ROE) reste à un niveau appréciable de 9,4%.
Pour leur part, les plus-values latentes ont enregistré un recul de 20,1% en lien essentiellement avec la contreperformance du marché boursier en 2018 conjuguée à une légère dépréciation du compartiment obligations. Au niveau prudentiel, les taux de couverture des engagements techniques par les placements effectués par les entreprises d’assurances et de réassurance se maintiennent à des niveaux supérieurs aux seuils réglementaires.
Aussi, le secteur continue de dégager une marge de solvabilité, en couverture du risque de souscription, largement supérieure au minimum réglementaire exigé. Ne couvrant que le risque de souscription, ces excédents de marge devraient se réduire de manière significative avec le passage vers un régime prudentiel de solvabilité basée sur les risques.
S’agissant des régimes de retraite, la sous-tarification des droits acquis dans le cadre de la branche long-terme de la CNSS et du régime général du RCAR conduit à une forte accumulation des dettes implicites (engagements non couverts) des deux régimes.
En ce qui concerne le régime des pensions civiles géré par la CMR, sa réforme paramétrique intervenue en 2016 a permis d’équilibrer sa tarification au titre des droits acquis après 2017.
Toutefois, l’importance des engagements du régime au titre des droits acquis avant la réforme menace sa pérennité à court terme, avec un épuisement des réserves projeté pour 2027/2028.
Le marché des capitaux continue à se développer tout en demeurant relativement stable au premier semestre 2019 en dépit des hausses modérées au niveau de la volatilité du marché boursier et obligataire à long terme. Le niveau de valorisation global du marché boursier reste élevé avec un PER de 19,7x. L'exposition des institutionnels marocains au marché boursier s’est renforcée après le cumul des positions nettes acheteuses enregistrées tout au long de l'année 2018 et du premier trimestre 2019.
Le marché de la dette privée s'est caractérisé par une hausse de 7,6% des émissions en glissement annuel à fin mai 2019. Seule une part de 19,6% de ces émissions est réalisée par les émetteurs non-financiers. Aussi, une réflexion est menée actuellement sur la mise en place d'un cadre de régulation adéquat relatif au marché de la dette privée, qui favoriserait son développement de manière sécurisée, en particulier auprès des émetteurs non-financiers.
L'actif net des OPCVM à fin mai 2019 est en hausse de 4,45% en glissement annuel. Une tendance à l'aversion au risque a été constatée de la part des souscripteurs aux OPCVM qui se sont orientés vers les catégories Obligataires.
Afin d'encourager le recours à la notation de crédit et ainsi accroitre la transparence pour les investisseurs et en particulier pour les OPCVM, ces derniers viennent d'être autorisés à détenir jusqu'à 15% de leurs actifs (au lieu de 10%) en titres de dettes lorsque l'émetteur est noté.
De plus, les règles en matière de transparence et de gouvernance des émetteurs ont été renforcées à travers notamment l'introduction de publications trimestrielles d'indicateurs financiers, d'un rapport ESG (Environnement, Social, Gouvernance) annuel et l'obligation de disposer d'administrateurs indépendants et d'un comité d'audit pour les sociétés cotées.