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Lancement du marché à terme : le projet qui va redéfinir l'investissement

Lancement du marché à terme : le projet qui va redéfinir l'investissement

Fruit d’un travail de longue haleine porté par l’ensemble de l’écosystème financier national, le marché à terme représente une véritable révolution pour la gestion des risques au Maroc. Dans cet entretien, Amine Maamri, CEO de CDG Capital Bourse et président de l’APSB, nous embarque dans les coulisses de cette transformation stratégique, expliquant avec clarté les opportunités pour les investisseurs, les entreprises et l’économie nationale dans son ensemble.

 

Propos recueillis par Gh. Bennani

Finances News Hebdo : Quels sont les objectifs principaux du marché à terme et quels bénéfices en attendon pour les investisseurs et l’économie ?

Amine Maamri : Avant toute chose, il est nécessaire de rappeler que le lancement du marché à terme est le fruit d’un travail ‘titanesque’ depuis de nombreuses années, qui a mobilisé l’ensemble de notre écosystème financier, sous l’égide du ministère des Finances, de l’AMMC, de la Banque centrale, de la Bourse de Casablanca, du GPBM et des différentes associations, dont la nôtre (l’Association professionnelle des sociétés de Bourse), pour porter ce projet de transformation très important pour notre marché des capitaux. L’objectif majeur de ce marché à terme est de doter notre place d’un outil moderne et indispensable de gestion des risques. Aujourd’hui, les investisseurs, les entreprises et les institutions ont besoin de mécanismes de couverture efficaces pour se couvrir contre la volatilité de l’ensemble des sousjacents (taux d’intérêt, matières premières, devises, actions), tout en maximisant les opportunités d’investissement; et le marché à terme vient justement répondre à ce besoin. Il a aussi pour objectif de renforcer la profondeur de notre marché en améliorant sa liquidité et sa transparence et contribuer à la sophistication de notre place financière en attirant de nouveaux profils d’investisseurs, stimulant l’innovation financière et contribuant au positionnement de Casablanca comme hub financier régional. Les bénéfices sont multiples. D’abord, le marché à terme permet de déterminer et verrouiller des prix à l’avance, donc de se prémunir contre des mouvements de marchés défavorables.

En plus d’être un outil de couverture, c’est aussi un outil de diversification, car il permet aux investisseurs d’élaborer des stratégies d’arbitrage et de gestion active du risque, ce qui répond aussi bien aux besoins des institutionnels que des gestionnaires d’actifs. En parallèle de ces éléments, il renforce la liquidité des marchés sous-jacents en améliorant leurs profondeurs. Un marché à terme, c’est aussi un levier de résilience économique. Il permet aux entreprises, notamment à certains secteurs exposés comme l’énergie, l’agroalimentaire, de mieux structurer leurs planifications et ainsi maîtriser leurs coûts. A cet élément s’ajoute une meilleure transparence des prix et une réduction des chocs externes, en particulier dans une économie comme la nôtre. Il est important de préciser que le lancement de ce marché ne consiste pas seulement à ajouter une ligne de produits à notre marché financier, mais à créer de nouvelles opportunités de croissance économique, de diversification et de gestion des risques, en donnant aux entreprises, institutions financières et investisseurs marocains la possibilité de tirer parti des opportunités tant sur les marchés domestiques que globaux. Enfin, et pas des moindres, c’est un signal fort que nous envoyons aux investisseurs internationaux à travers la modernisation de nos infrastructures de marché pour les hisser aux meilleurs standards internationaux; signal qui se joint aux grands projets structurants que connaît notre Royaume.

 

F. N. H. : Quels seront les premiers produits disponibles et comment fonctionnera ce marché en pratique ?

A. M. : Dans une première phase, le marché à terme marocain propose essentiellement des contrats à terme sur indice boursier, en particulier un contrat sur l’indice MSI 20 qui regroupe les principales actions du marché boursier. Ce produit permettra aux investisseurs de se couvrir contre les fluctuations du marché boursier de Casablanca, ou prendre des positions stratégiques anticipant la tendance du marché sans détenir directement des actions. Dans un deuxième temps, suivront le Future sur taux d’intérêt et le Future sur actions, évoluant avec la montée progressive et la maturité du marché. Son fonctionnement est basé sur modèle organisé et sécurisé, avec comme acteur clé l’intervention de la Chambre de compensation comme contrepartie de l’acheteur et du vendeur, qui va garantir le dénouement des transactions et réduire le risque de contrepartie. Techniquement, les investisseurs devront passer leurs ordres via des membres négociateurs, qui peuvent être les sociétés de Bourse et les banques ayant obtenu préalablement un agrément délivré par l’ICMAT (Instance de coordination du marché à terme, composée de l’AMMC et de BAM). Ces ordres seront exécutés sur une plateforme dédiée, selon les règles de transparence et de formation des prix très strictes.

A chaque transaction, une ‘marge initiale’ sera exigée par la Chambre de compensation : c’est une forme de dépôt de garantie requis pour initier la transaction, et des appels de marge (appelée ‘Margin Call’) pourront intervenir en cas d’évolution défavorable par rapport à la position initiée par l’investisseur. A noter que la Chambre de compensation devient la contrepartie unique et permet d’avoir un système hautement sécurisé, normé et totalement transparent, à l’image des grands marchés internationaux. Concrètement, pour les négociateurs, notamment les sociétés de Bourse, le fonctionnement se fera via des plateformes régulées, où les contrats seront standardisés. Les investisseurs pourront acheter et vendre des contrats à terme en fonction de leurs attentes sur les évolutions futures des indices, des taux d’intérêt, des actions, et plus encore. Comme expliqué précédemment, le système de marge permettra aux investisseurs de contrôler des positions plus importantes avec un investissement initial relativement faible, tout en nécessitant des ajustements réguliers pour maintenir les positions ouvertes. Les transactions seront transparentes et se feront selon des mécanismes de règlement quotidien, avec un système de liquidation de risques pour éviter les défauts de paiement. Cela permettra de garantir une plus grande sécurité et liquidité sur le marché, tout en assurant la conformité avec les régulations financières.

 

F. N. H. : Quels sont les principaux acteurs impliqués dans le marché à terme ?

A. M. : Un marché à terme repose sur un écosystème bien structuré et réglementé sur l’ensemble de la chaîne de valeurs, avec plusieurs acteurs qui ont des rôles complémentaires et bien défini : Je citerai d’abord :

• L’instance de coordination du marché à terme (ICMAT) : Le marché à terme est supervisé par cette instance de coordination composée de l'Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC) et de Bank Al-Maghrib (la Banque centrale du Maroc). Ces deux entités sont responsables de la régulation, de la surveillance et de la mise en œuvre des politiques visant à assurer la stabilité du marché. Elles veillent à ce que le marché fonctionne de manière transparente, sécurisée et efficace, tout en protégeant les intérêts des investisseurs.

• La Société gestionnaire du marché à terme (SGMAT) : C’est une société anonyme créée pour gérer le marché à terme des instruments financiers, en vertu d'une concession accordée par l'État. Elle fonctionne selon un cahier des charges approuvé par le ministère des Finances, qui définit les obligations liées à son fonctionnement, à l'enregistrement et à la publicité des transactions, ainsi qu'aux règles déontologiques à respecter par son personnel et ses instances dirigeantes. Le capital minimum de la société est fixé par le ministère, après avis de l’AMMC, et les actionnaires sont déterminés par arrêté ministériel. Le SGMAT facilite la négociation des contrats à terme, assurant la liquidité, la transparence et un environnement sécurisé pour les participants.

• La Chambre de Compensation (CCP) : Elle joue un rôle crucial en garantissant le bon règlement des transactions. Elle agit comme un intermédiaire entre les participants, en assurant la compensation et le règlement des opérations. Cela permet de gérer le risque de contrepartie et d’assurer la stabilité du marché. La CCP surveille également les mécanismes d’appels de marge et les garanties nécessaires pour la gestion des risques financiers.

• Les membres négociateurs : Ils sont principalement les sociétés de Bourse, mais peuvent être aussi les banques, qui auront, pour celles qui le désirent, le statut de compensateur et négociateur. Ces membres négociateurs servent d’intermédiaires financiers et facilitent les échanges sur le marché à terme. Ils permettront aux investisseurs d'acheter et de vendre des contrats à terme en fonction de leurs stratégies de couverture ou de spéculation. Ils auront également la possibilité de négocier pour leur propre compte. Ils assurent le lien entre les investisseurs et les produits financiers disponibles sur le marché à terme.

• Les membres compensateurs : Ils sont généralement des banques. Elles sont responsables de la compensation des transactions, en garantissant que les paiements sont effectués et que les obligations financières sont respectées. Elles interviennent pour assurer le règlement des flux financiers entre les différentes parties, et gèrent également les risques de crédit et de contrepartie pour toutes les transactions effectuées sur le marché à terme.

• Les investisseurs : Ce sont également des acteurs majeurs du marché à terme. Ils participent en achetant ou en vendant des contrats à terme en fonction de leurs objectifs financiers. Les investisseurs peuvent être des particuliers, des institutions financières, des entreprises ou des fonds d’investissement.

• Les investisseurs institutionnels utilisent souvent le marché à terme pour se couvrir contre les risques, par exemple en se protégeant contre les fluctuations des taux d’intérêt ou des prix des matières premières.

• Les investisseurs spéculatifs, quant à eux, utilisent les contrats à terme pour parier sur les mouvements futurs des actifs sousjacents (indices, actions, taux d’intérêt, etc.) dans l’espoir de réaliser des profits en fonction de l’évolution de ces marchés.

 

F. N. H. : Qui peut investir dans ce marché et quelles sont les conditions d’accès pour les différentes catégories d’investisseurs ?

A. M. : J’aimerais préciser un point crucial avant de parler des investisseurs  : l’accès à ce marché, comme expliqué, sera progressif et encadré. Il est important de souligner l’apport central de l‘AMMC qui a adopté une approche collaborative, de soutien envers l’ensemble des acteurs pour garantir un déploiement réussi. Il faut aussi mentionner que c’est aussi un nouvel environnement pour les professionnels (futurs négociateurs et compensateurs), qui nécessite avec l’ensemble des autres acteurs une montée en compétence sur l’ensemble de la chaîne de traitement. Et notre défi majeur réside dans cette montée en puissance collective et progressive dans un environnement réglementaire sain et transparent pour attirer une large base de participants, incluant les investisseurs locaux et internationaux.

Pour ce qui est des catégories d’investisseurs :

• Les investisseurs institutionnels, notamment les banques, les compagnies d’assurances, les caisses de retraite, les sociétés de gestion, les fonds d'investissement peuvent investir sur le marché à terme. Ces acteurs disposent généralement de ressources financières importantes et ont des besoins spécifiques en termes de couverture ou de spéculation sur les marchés.

• Les entreprises et opérateurs économiques  : Les entreprises marocaines, notamment celles exposées à des risques de taux de change ou de matières premières dans un objectif de couverture du risque pourront accéder à ce marché.

• Les investisseurs particuliers (personnes physiques) : Dans un premier temps, le marché à terme ne sera pas accessible aux personnes physiques, car il est nécessaire, comme mentionné, d’accompagner progressivement son ouverture compte tenu des risques et de sophistication de ce marché. Un certain nombre de conditions d’accès sont exigées pour l’accès à ce marché, dont notamment :

• Enregistrement auprès d'une société de Bourse : Pour participer, les investisseurs particuliers doivent ouvrir un compte auprès d’une société de Bourse (SDB) qui sera leur intermédiaire sur le marché à terme.

• Dépôt initial et marges : Les investisseurs doivent effectuer un dépôt initial pour pouvoir ouvrir une position. En outre, ils doivent maintenir un matelas suffisant pour

couvrir les appels de marge. Ce matelas est nécessaire pour garantir que l’investisseur peut répondre aux variations de prix et maintenir ses positions ouvertes sans risque de défaut. • Transparence et régulation : Les investisseurs doivent se conformer aux exigences de transparence imposées par l'AMMC et Bank Al-Maghrib, qui supervisent le marché à terme pour garantir une bonne régulation, une gestion appropriée des risques et la protection des investisseurs.

 

F. N. H. : Quel cadre réglementaire encadre le marché à terme au Maroc, et y a-t-il une loi spécifique régissant les produits dérivés ?

A. M. : Le Maroc s’est doté d’un cadre réglementaire législatif et réglementaire précis, structuré et spécifique pour encadrer les marchés à terme et les instruments financiers dérivés. Cette étape cruciale avant le lancement de ce marché s’est inscrite avec une volonté d’assurer la sécurité, la transparence, la stabilité et la bonne gestion de ces produits dérivés. Le socle légal est principalement défini par la loi n° 42-12 (2015) qui régit le marché à terme des instruments financiers. Cette loi fondatrice, qui représente la colonne vertébrale du marché à terme, s’appuie sur tout un écosystème réglementaire et institutionnel : textes d’application émis par l’AMMC, règlement de la Bourse de Casablanca et de Maroclear, supervision conjointe avec Bank Al-Maghrib, avec une conformité aux standards internationaux. S’agissant des produits dérivés, cette loi encadre juridiquement l’ensemble des instruments financiers à terme, couvrant une définition légale, un encadrement de ces marchés dérivés en déterminant les règles de leurs fonctionnements, le rôle et obligations de chaque acteur.

 

F. N. H. : Quelles obligations et exigences réglementaires doivent respecter les sociétés de Bourse et les membres compensateurs pour opérer sur le marché ?

A. M. : Les sociétés de Bourse et les membres compensateurs doivent respecter un certain nombre d'obligations et d'exigences réglementaires pour pouvoir opérer sur le marché à terme. Ces exigences sont encadrées principalement par la loi n° 42-12, ainsi que par les régulations mises en place par l'AMMC et Bank Al-Maghrib, tel que partagé dans ma précédente réponse. Je citerai l’étape d'agrément des membres qui est une étape importante, car ils sont une partie prenante centrale de la crédibilité, la transparence et la sécurité du marché. Cette étape fixe l’ensemble des exigences requises à travers un cahier des charges détaillé pour pouvoir intervenir sur ce marché. A titre d’exemple, pour les sociétés de Bourse, la fixation des niveaux de capital minimal pour exercer l’activité de négociation, les règles prudentielles applicables, le dimensionnement des moyens humains et techniques, le respect des exigences de transparence et de reporting, les obligations vis-àvis des clients. En d’autres termes, les membres négociateurs devront disposer d’une solidité financière, de ressources humaines qualifiées, de systèmes d’information robustes, d’un cadre de gestion des risques adapté à la complexité des produits dérivés, une cartographie des processus internes claire et documentée. Enfin, et pas des moindres, ils doivent veiller à informer leurs clients sur les risques inhérents à ces produits et assurer les reportings règlementaires au régulateur (AMMC).

 

F. N. H. : Quelles mesures sont mises en place pour gérer les risques et éviter les défauts de contrepartie ?

A. M. : C’est une excellente question, car l’infrastructure mise en place est le cœur même pour veiller au bon fonctionnement de ce marché. La gestion du risque est le centre névralgique de tout marché à terme. Contrairement au marché au comptant où les titres sont livrés contre paiement (LCP), les produits dérivés génèrent des engagements futurs, ce qui expose les intervenants à des risques de défaut de contrepartie, c’est-à-dire la possibilité qu’un acteur de la transaction ne puisse pas honorer ses obligations à l’échéance du contrat. Pour y faire face, plusieurs mécanismes réglementaires et opérationnels ont été mis en place, en cohérence avec les standards internationaux tels que les 2 instances de normalisation financières Committee on Payments and Market Infrastructures (CPMI) et International Organization of Securities Commissions (OSCO). L’élément clé de ce dispositif est l’intervention de la Chambre de compensation centrale (CCP).

Comme expliqué, elle intervient comme tiers entre les acheteurs et les vendeurs, en devenant la contrepartie centrale de chaque transaction. Elle garantit que même en cas de défaillance d’un intervenant, le contrat sera honoré. Cela mutualise le risque, le rend plus prévisible et renforce la stabilité du système. Concrètement, le système repose sur une logique simple  : prévenir avant de guérir. Dès l’initiation d’une transaction, une marge initiale est exigée. C’est une garantie déposée par chaque partie pour couvrir le risque de variation défavorable. Chaque jour, en fonction de l’évolution du marché, des marges de variation (ou appels de marge ou ‘Margin Call’) sont calculées et exigées par la Chambre de compensation pour revaloriser les positions au prix du jour. Ce mécanisme permet aussi de limiter drastiquement le risque d’accumulation de pertes non couvertes. Dernier élément dans la gestion de ces risques : la CCP peut imposer des limites de positions par intervenant, par produit afin d’éviter les expositions disproportionnées et peut être amenée à clôturer des positions automatiquement pour limiter les pertes. Cette CCP procède à des tests de scénarios extrêmes (stress test) afin de pouvoir être en mesure d’adapter les exigences de marge et de pouvoir calibrer le fonds de garantie en cas de période de volatilité brutale telle que nous connaissons actuellement ou de défaillance grave. Tous les membres compensateurs, qui sont les banques de la place, contribuent à un fonds de garantie collectif, destiné à couvrir les pertes potentielles en cas de défaillance grave. Ce mécanisme de solidarité est essentiel pour préserver la confiance dans le système.

 

F. N. H. : L’absence des market makers est une problématique soulevée par les acteurs du marché. Où en est-on dans leur mise en place et quel sera leur rôle?

A. M. : L'absence de market makers sur le marché à terme est effectivement un point identifié par les acteurs du marché, notamment en phase de lancement de la première brique du marché à terme. Il est prématuré de parler de problématique, sachant que c’est un nouveau marché et que tout l’écosystème, professionnels y compris, a besoin d’une trajectoire progressive d’adaptation, de développement et de montée en compétence sur l’ensemble de la chaîne. Il est clair qu’un marché à terme ne peut fonctionner efficacement sans liquidité suffisante, et c’est là qu’interviennent les market makers, ou teneurs de marché. Leur rôle est d’assurer en permanence une liquidité permanente sur les contrats à terme en offrant des cotations ‘achat’ ‘vente, réduire les spreads entre les prix achat et vente, ce qui garantit aux investisseurs la possibilité d’entrer et de sortir du marché à tout moment, sans perturbation excessive sur les prix.

Au Maroc, la mise en place des market makers a été bien identifiée comme une priorité dans la phase de lancement du marché à terme. Mais il s’agit d’un sujet délicat, car cela suppose de trouver des acteurs capables et volontaires d’assumer ce rôle, souvent contraignant en termes de capital et de gestion du risque. A ce dernier, s’ajoute un autre élément du fait que cette activité est déjà bien établie sur le marché des taux, vu la taille et l’importance de ce marché comparativement à celui des actions dont la profondeur est jugée moins importante par les opérateurs. Aujourd’hui, l’AMMC, la Bourse de Casablanca et les parties prenantes travaillent activement pour définir un cadre d’intervention clair qui répond à l’intérêt des différentes parties prenantes, pour que des market makers soient opérationnels dans un délai très court après les premières transactions au courant des prochaines semaines. C’est une condition indispensable à la crédibilité et à l’attractivité de ce nouveau marché.

 

F. N. H. : Quels sont les principaux défis pour garantir un bon fonctionnement du marché et favoriser son adoption par les investisseurs ?

A. M. : Le lancement d’un marché à terme est déjà en soi une avancée majeure. Je pense que dans quelques années, nous le réaliserons vraiment, mais son succès ne se décrète pas, il dépend de plusieurs facteurs clés, qu’il faut piloter avec rigueur et vision :

• Garantir la liquidité, car sans contrepartie, les investisseurs ne pourront pas se positionner quand bien même le produit est pertinent. D’où, comme on l’a évoqué, la présence des market makers qui assurent des prix de cotation en continu.

• La montée en charge des acteurs sur l’ensemble de la chaîne de traitement, car les produits dérivés sont complexes et pour accompagner les investisseurs et les entreprises, nous devons maintenir un effort pédagogique continu et même accéléré avec des programmes de formation ciblée et des guides pratiques. C’est aussi un enjeu important de culture financière.

• Les intervenants doivent avoir confiance dans le cadre réglementaire, car il a été le fruit d’un long et fastidieux travail. L’AMMC, la Bourse de Casablanca et la Chambre de compensation ont joué un rôle clé et vont continuer pour garantir cette stabilité réglementaire et opérationnelle.

• S’adapter au contexte économique : le marché à terme doit répondre à des besoins concrets. Si les produits listés ne correspondent pas aux risques réels des acteurs économiques (taux, change, matières premières, etc.), l’intérêt reste limité. Il faudra donc élargir l’offre progressivement, en tenant compte du tissu économique local.

• Elargir la masse des intervenants, car on a besoin d’encourager la participation active de notre écosystème local (institutionnels, sociétés de gestion, entreprises, banques, particuliers) pour attirer des investisseurs étrangers. Enfin, j’aimerais conclure en disant qu’il faut garder à l’esprit que notre défi, ce n’était pas simplement de lancer un marché, c’est de le faire vivre. Et cela demande une vision stratégique, une animation constante, une capacité à écouter les besoins des intervenants et un effort collectif et durable. Ces conditions ont déjà été réunies pour préparer son lancement; à nous de maintenir cette dynamique pour que le marché à terme puisse devenir un véritable levier de transformation pour notre place financière. 

 

 

 

 

 

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