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KYC, un enjeu de premier ordre pour les banques

KYC, un enjeu de premier ordre pour les banques

Entretien avec Ziad Baddou, manager chez Ailancy et spécialiste de la problématique KYC chez les banques.


 

Les opérateurs du secteur financier, les banques en tête, sont dans l'obligation de mieux connaître leurs clients pour respecter les contraintes réglementaires.

Ce processus réputé chronophage occupe une bonne partie du budget conformité des banques.

 

Propos recueillis par Adil Hlimi

 

Finances News Hebdo : Connaître son client est devenu une nécessité pour les acteurs du marché financier, particulièrement les banques. Des raisons réglementaires à cela ?

Ziad Baddou : Les évolutions réglementaires au Maroc et dans le reste du monde depuis une dizaine d’années ont fait de la connaissance client «KYC» (Know your customer ndlr) un enjeu majeur pour les institutions financières.

En effet, depuis 2008, de plus en plus de règlementations internationales encadrent la collecte de données clients de façon à l’étendre, la restreindre, la mettre en qualité (la corriger et/ou en reconstituer l’historique), ou encore contrôler son utilisation.

L’objectif sous-jacent est principalement de lutter contre l’évasion fiscale, le blanchiment d’argent ou le financement du terrorisme. Cela concerne tant les personnes physiques que les personnes morales.

Pour se mettre en conformité, les banques sont dans l’obligation d’adapter sans cesse leurs processus KYC internes, notamment lors des entrées en relation avec leurs clients.

En cas de manquement à ces obligations règlementaires, les banques peuvent s’exposer à des sanctions pénales ou administratives.

 

F.N.H. : Les banques peuvent-elles transformer ces contraintes réglementaires en opportunités commerciales ?

Z. B. : Les contraintes réglementaires liées au KYC peuvent également s’avérer être des opportunités commerciales. En effet, la collecte et la fiabilisation des données clients dans le cadre du «KYC» permettent aux banques de disposer de données qualitatives.

Ces informations peuvent permettre aux banques de mieux caractériser leurs clients pour appréhender leurs besoins et leurs attentes en développant et en commercialisant de produits et services sur-mesure ou plus adaptés aux spécificités de chacun.

 

F.N.H. : De quelle manière les banques marocaines sont-elles concernées par le «KYC» ?

Z. B. : Toutes les banques installées au Maroc, quelle que soit l’origine de leurs capitaux (français ou marocains), sont aujourd’hui concernées par la problématique du KYC.

Ainsi, si l’on prend l’exemple de la loi FATCA (loi extraterritoriale américaine contre l’évasion fiscale), le Parlement marocain l’a approuvée et publiée au Bulletin officiel en 2018. Elle oblige les établissements financiers installés hors des États-Unis à déclarer à l’administration fiscale américaine les avoirs et les revenus de toute nature des contribuables ayant le statut «US Person». Le terme désigne à la fois les personnes physiques et morales. La non-conformité à ce système expose les institutions financières à des sanctions pécuniaires.

Or, sans la mise en place d’un processus «KYC» efficace, il est difficile d’automatiser la détection des indices d’américanité nécessitant une déclaration aux autorités américaines.

 

F.N.H. : Selon votre expérience, quels sont les principaux enjeux pour un processus KYC efficace ?

Z. B. : Il y a 4 principaux enjeux pour une gestion efficace du KYC. D’abord, la mise en place d’une veille règlementaire exigeante afin que les institutions financières puissent faire évoluer la gestion de leurs données clients au rythme des évolutions règlementaires.

Ensuite l’optimisation des processus internes, car la complexité des processus couplée à la densité des informations demandées rendent la réalisation du KYC particulièrement chronophage.

Troisièmement, la réduction des coûts, compte tenu de la multitude d’acteurs internes qui interviennent dans les processus KYC (front office, back-office, conformité, …).

Enfin, l’amélioration de la qualité et de la fiabilité des données en réduisant la production manuelle des données ainsi que les risques de saisie y afférents.

 

F.N.H. : Ce processus est-il lourd et coûteux à mettre en place ?

Z. B. : La mise en place de processus KYC nécessite naturellement un coût de mise en place et de fonctionnement. Le processus de réalisation d’un KYC est une démarche impliquant plusieurs départements d’un même établissement, et les «allers-retours» entre les chargés de KYC et les clients peuvent être nombreux.

De plus, l’investissement du front-office peut constituer une perte de temps vis-à-vis des démarches purement commerciales.

Le KYC est une démarche chronophage et coûteuse dans un budget conformité. Le coût final d’un KYC n’est pas fixe et dépend de la complexité du profil du client. En moyenne, il faut consacrer près d'un mois pour finaliser le processus KYC pour un nouveau client. Ceci dépend du profil de risque de ce client. 

Selon une étude menée par Thomson Reuters, le coût de la conformité KYC a doublé depuis 2009. Les coûts de mise en conformité au KYC dépend également du modèle de mise en place choisi par chaque institution financière, à savoir la revue globale du model opérationnel IT, l’outsourcing, la mutualisation ou l’acquisition d’un progiciel dédié. ◆

 

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