La pénétration mobile offre des opportunités au développement de l’inclusion financière.
Le paiement mobile en est le principal moteur.
Par Y.S
Plus que jamais d’actualité au Maroc, l’inclusion financière mobilise aujourd’hui gouvernement, Banque centrale, secteur bancaire et associations.
A ce jour, pas moins de 40 pays ont déjà formulé des stratégies nationales d’inclusion financière, en fixant des objectifs stratégiques et en définissant les réformes à mener. Certains, parmi ces pays, ont accéléré le déploiement avec des résultats plus que satisfaisants, notamment la Chine, le Kenya et l’Indonésie.
Pour Sidimohamed Abouchikhi, administrateur-Directeur général de Crédit Info*, «3 facteurs clés de succès y ont contribué». Il s’agit des «métadonnées, d’une stratégie centrée consommateur et des technologies».
Bien sûr, la technologie numérique ne suffit pas à elle seule pour accroître l’inclusion financière. Mais elle offre des opportunités pour réduire le nombre d’adultes non titulaires de compte et aider ceux qui en ont un à l’utiliser plus souvent. Et l’Afrique en est le parfait exemple, grâce notamment au paiement mobile.
Avec une population d’environ 1,2 milliard d’habitants dans les 54 pays, les estimations du Global Findex 2017 indiquent que des progrès notables dans la tenue de compte des adultes sont enregistrés dans un établissement financier, qui est passé de 34% en 2014 à 43% en 2017, contre une moyenne mondiale de 68,5%. L’argent mobile est considéré comme le principal moteur de l’inclusion financière en Afrique subsaharienne, où 21% des adultes de la région ont un compte de mobile payment.
Une étude en 2016 montre que depuis le lancement de M-Pesa en 2007, l’utilisation généralisée des services m-paiement au Keyna a permis de sortir 194.000 ménages (soit 2% des ménages Kényans) de la pauvreté entre 2008 et 2014.
D’ailleurs, c’est l’un des leviers activés par le Maroc dans sa stratégie nationale d’inclusion financière. Bank Al-Maghrib prévoit en effet 6 millions d’utilisateurs pour ce nouveau mode de paiement d’ici 2024, pour un nombre de transactions de 1,3 milliard.
Bruno Aka, chargé de l'investissement en chef à la Banque africaine de développement( BAD), nous explique, lors du Forum international des innovations dans l’inclusion financière, tenu les 13 et 14 juin courant, que «la pénétration de la téléphonie est l’une des opportunités qui permet l’accélération de l’inclusion financière en Afrique. On note, selon Global Findex 2014, une pénétration de la téléphonie mobile de près de 67%. En outre, l’argent mobile a diminué les coûts des services financiers de 80 à 90%. Elle a tout autant permis de réduire la pauvreté dans des pays comme le Kenya».
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Lorsque l'on parle de barrières à l'inclusion financière, il est important de distinguer l'exclusion volontaire de l'exclusion involontaire. L'exclusion volontaire est liée à des choix microéconomiques de ne pas recourir aux services financiers formels. Elle se fait plutôt du côté de la demande de services financiers. Les motifs religieux et le fait qu'un membre de la famille ait déjà un compte, sont des exemples de barrières volontaires.
Les barrières involontaires proviennent de facteurs subis qui excluent une population. Elles se font plutôt du côté de l'offre de services financiers. Par exemple, la distance avec la banque, le coût trop élevé et le manque de documents officiels sont des barrières involontaires.
La barrière la plus importante en Afrique est la même qu'au niveau global, selon la Banque mondiale : le manque de moyens financiers (70,8 %). Nous pouvons ensuite constater que les principaux obstacles sont involontaires : coût trop élevé (27,7%), distance avec la banque trop importante (25,6%), manque de documents officiels (21,5%). Les barrières volontaires que sont les motifs religieux et le fait qu'un membre de la famille ait déjà un compte sont les facteurs les moins importants (respectivement 7,2% et 7,6%). ◆
La stratégie de la BAD en la matière est bien claire. Sa vision est de permettre un accès de la population exclue et sous-desservie âgée de 15 ans et plus aux services de paiements formels, d’épargne, de crédit, de transfert et d’assurance de manière responsable et durable. Objectif : fournir l’accès aux services financiers formels à 80% des Africains de cette tranche d’âge d’ici 2020. «Cela, grâce à une stratégie basée sur une approche écosystème et fondée sur 4 piliers essentiels : la mise en place d’une infrastructure de paiement fiable, la plaidoirie à la mise en place d’un cadre réglementaire favorable au développement de la monnaie électronique auprès des Banques centrales, l’aide au développement de l’infrastructure du marché financier et le soutien à l’innovation technologique», énumère Bruno Aka.
* Ce dernier s’exprimait à l’occasion du Forum international des innovations dans l’inclusion financière qui a eu lieu à Casablanca du 20 au 21 juin.