Dès janvier 2016, l’obligation de la télédéclaration et du télépaiement s’étend aux entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse le seuil de 10 millions de dirhams. Modus operandi d’une procédure qui va impacter la relation des contribuables à l’administration fiscale.
La dématérialisation des procédures fiscales au Maroc poursuit son bonhomme de chemin. Limitée jusqu’ici aux grandes entreprises, l’obligation de la télédéclaration et du télépaiement de l’impôt va progressivement intégrer le tissu des PME et TPME. De 100 millions de dirhams en 2010 à 50 millions de dirhams en 2011, le seuil minimum requis pour s’y conformer sera ramené à 10 millions de dirhams dès janvier 2016, puis à 3 millions de DH dès janvier 2017. «Il n’est pas exclu que l’obligation soit généralisée dès 2017», prévoit Adil Cherradi, expert-comptable, commissaire aux comptes chez Concept Performance. Ce dernier a été l’invité d’une rencontre organisée récemment par la Chambre française de commerce et d’industrie du Maroc (CFCIM) sous le thème: «L’arrêté des comptes et la télédéclaration fiscale : ce qui change pour les bilans 2015».
S’agissant du cas spécifique des professions libérales, dont le chiffre d’affaires est supérieur ou égal à un million de DH, rappelons que l’obligation a été prévue par la Loi de Finances 2014 mais a dû être repoussée pour des considérations pratiques. Le modus operandi a finalement fait l’objet d’un décret publié en mars dernier pour une entrée en vigueur fixée au 1er octobre 2015, quoique la liste des professions libérales concernées demeure limitative : celles ne figurant pas sur la liste sont exclues de l’obligation.
La Direction générale des impôts (DGI) adopte deux modes de télédéclaration. D’une part, l’Echange de formulaires informatisés (EFI), valable notamment pour la TVA. Il s’agit de saisir manuellement, sur le portail de la DGI, quelques données sur des cases identiques à celles de l’ancien formulaire papier. D’autre part, l’Echange de données informatisées (EDI), réservé aux déclarations volumineuses (liasse fiscale, déclaration des salaires, etc). Il s’agit d’un fichier crypté, qui doit répondre à un cahier des charges fixé par l’ADII. L’utilisation d’un logiciel pour générer ce fichier est vivement recommandée.
La télédéclaration ainsi que le télépaiement de l’IS se font à la fois en mode EDI et EFI. Pour l’IR, mis à part le traitement des salaires et des pensions (nécessitant l’EDI), toutes les autres déclarations se font exclusivement en EFI. S’agissant enfin de la TVA, sachant que seul l’EFI est adopté à ce jour, la DGI vient d’autoriser l’envoi en mode EDI de la déclaration du relevé des déductions, à compter du premier semestre 2016. Désormais, les entreprises pourront transmettre (selon un format prédéfini) à la DGI ledit relevé directement à partir de leur système d’information ou de leur logiciel de comptabilité, et ce sans avoir à l’exporter dans des fichiers et l’attacher à la déclaration en tant que pièce jointe.
Le processus de télédéclaration s’articule autour de trois phases essentielles : l’inscription, le paramétrage et la validation de la DGI. L’inscription se fait sur une simple adhésion au service «simple adhésion» sur le portail de la DGI qui, généralement, envoie un code dans un délai de deux à trois jours. Au niveau du paramétrage, le système prévoit plusieurs niveaux d’utilisation (consultation, saisie, dépôt, validation). Le fameux problème lié à l’accès aux déclarations sociales (salaires du personnel) et fiscales a été résolu en rajoutant des options permettant de choisir l’attributaire des droits d’utilisation du compte de l’entreprise sur le portail de la DGI.
Autre nouveauté décrétée cette année, souligne Adil Cherradi, la possibilité de déléguer la réalisation des formalités de télédéclaration à une entreprise tierce (expert-comptable, holding, etc). Mais la responsabilité de la déclaration fiscale revient à l’entreprise concernée et, en aucun cas, à l’entité déléguée.
Enfin, une fois les formalités requises accomplies, il faut compter près d’une semaine pour avoir la validation du Fisc. Mais il est conseillé d’anticiper les procédures pour éviter les surprises, notamment la lenteur de navigation sur le portail de la DGI caractérisant certaines échéances, en particulier le 31 mars, date limite de dépôt de la déclaration des résultats.
Une chose est sûre, la télédéclartion et le télépaiement des impôts vont lourdement modifier le profil de la profession comptable. «Les cabinets d’expertise-comptable risquent de ne pas suivre s’ils n’investissent pas dans la formation», insiste Abdelaziz Arji, commissaire aux comptes et fondateur du cabinet Eurodefi.
Professions libérales : Quels sont les métiers concernés ?
A compter du 1er octobre 2015, les professions libérales, dont le chiffre d’affaires est égal ou supérieur à 1 million de dirhams, sont tenues de déposer auprès de la DGI, par procédé électronique, les déclarations et effectuer les paiements prévus en matière d’IS, d’IR et de TVA. Cette mesure concerne les métiers suivants :
- Avocats, notaires, experts-comptables, comptables.
- Architectes, métreurs-vérificateurs, géomètres, topographes, ingénieurs conseils, conseillers juridiques et fiscaux, conseils et experts en toute matière, coachs, décorateurs, assureurs, courtiers ou intermédiaires d’assurances, interprètes, traducteurs.
- Médecins, médecins en toute spécialité, exploitants des cliniques, maisons de santé ou de traitement, masseurs kinésithérapeutes, exploitants de laboratoires d’analyses médicales et vétérinaires.
Wadie El Mouden