Karim Hajji, Directeur général de la Bourse de Casablanca, et président de l’Association des Bourses africaines, dévoile les étapes à venir du projet AELP (African Exchanges Linkage Project).
Par A.E
Le Comité exécutif de l'ASEA (Association des Bourses africaines) a tenu sa première réunion à Marrakech, au Maroc, le 9 février 2019, sous la présidence de Karim Hajji, Directeur général de la Bourse de Casablanca, nouvellement élu à la tête de l’Association.
L’un des points clés à l’ordre du jour de la réunion du Comité a été de réfléchir aux objectifs stratégiques de l’ASEA pour les deux prochaines années. Au menu notamment : l’accroissement de la liquidité, le plaidoyer pour une réglementation plus favorable aux marchés de capitaux, le renforcement des capacités des acteurs des marchés des capitaux et, surtout, la poursuite du fameux projet d’interconnexion entre les Bourses africaines, baptisé AELP (African Exchanges Linkage Project). En effet, en marge de la 51ème réunion du Comité exécutif de l’ASEA, s’est tenue la 5ème réunion du Comité directeur du Projet AELP.
Comme cela avait été dévoilé à l’occasion du dernier Meeting sur l’information financière organisé par Maroclear, la Bourse de Casablanca et Finances News Hebdo, ce projet consiste en la création d’une interconnexion entre les Bourses africaines de manière à favoriser le développement de la liquidité et permettre aux capitaux de se déplacer des régions qui ont des excédents structurels de liquidité, comme l’Afrique australe ou l’Afrique centrale, vers des régions qui ont des besoins structurels de financement, comme en Afrique de l’Ouest.
L’Association a donc pour vocation de permettre cette mobilisation et cette mobilité des capitaux d’une partie du continent vers une autre, favoriser les investissements pour les fonds de pension et les compagnies d’assurances et faciliter aux émetteurs la possibilité de financer leur projet d’investissement.
«Ce projet démarrera avec 6 Bourses du continent dans un premier temps (Casablanca, Johannesburg, la BRVM d’Abidjan, Maurice, Nairobi et Lagos), auxquelles s’est ajoutée récemment la Bourse du Caire, à sa demande», souligne Karim Hajji.
Ajustements réglementaires
Concrètement, ce projet doit permettre à des investisseurs au Maroc de placer leur excédent de liquidité dans ces marchés. Pour cela, précise Hajji, il faut que la réglementation évolue. Et cela en prend visiblement le chemin.
En effet, l’Office des changes avait l’habitude d’émettre une circulaire qui précise les zones géographiques dans lesquelles les investisseurs marocains sont autorisés à investir. «L’Office des changes a décidé de déléguer à l’AMMC et à l’ACAPS, le choix de ces zones géographiques. Il y aura donc un assouplissement des conditions d’investissement pour les institutionnels marocains», se félicite le DG de la Bourse de Casablanca.
Mise à part cette contrainte qui est en passe d’être levée, il n’y en aurait, a priori, pas d’autres susceptibles de faire obstacle aux flux d’investissements entre zones géographiques. «La Banque africaine de développement a, lors d’une étude préliminaire, déterminé que les 7 Bourses en question ne présentent pas de contraintes majeures qui s’opposeraient à cette interconnexion», fait savoir notre interlocuteur.
Outre les questions liées à la réglementation, celles portant sur les infrastructures de marché devront également être résolues. Chaque Bourse ayant son système d’information, il est difficile d’imaginer un seul système pour connecter toutes ses Bourses entres elles.
«Il s’agit donc plutôt de mettre en place une sorte de «tuyau» pour permettre aux flux de parvenir à toutes ces Bourses. Cela peut être fait soit par le biais d’un fournisseur d’informations financières, soit par le biais d’un applicatif qui permettrait de connecter entre elles toutes ces Bourses», explique Karim Hajji.
Concernant la garde de titres, on se dirige vers une solution locale simple, où chaque Bourse opérera avec son propre dépositaire, plutôt que d’aller vers un dépositaire unique panafricain.
«Ceci permettra de limiter dans un premier temps les risques de change pour les émetteurs», indique Hajji. Le dénouement se déroule dans le pays, auprès du dépositaire local, où la transaction s’effectue dans la devise locale.
Calendrier
La mise en œuvre de ce projet prometteur doit encore passer par plusieurs étapes avant sa concrétisation. La première porte sur la finalisation du contrat de financement avec la Banque Africaine de développement (BAD), sachant qu’un don d’une valeur de 980.000 dollars a été octroyé au projet AELP par la Coopération économique entre la Corée et l’Afrique (Korea-Africa Economic Coopération). «Ce qui devrait être fait dans les 30 jours qui viennent», indique Hajji.
La deuxième phase consistera à recruter un chef de projet (PMO) qui serait financé par la BAD, et dont le profil a déjà été arrêté. Ce PMO aura notamment pour fonction d’assurer la coordination avec l’ensemble des parties prenantes, notamment les sociétés de Bourse, les gestionnaires d’actifs, les autorités de marché, etc.
Une phase de sensibilisation envers ces mêmes parties prenantes, et notamment les ministères et les Banques centrales des pays concernés, est également programmée.
«Notre objectif c’est qu’au moins dans les 24 mois, les premières opérations soient lancées», espère Karim Hajji. ◆