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Banques : résilience éprouvée, défis renouvelés

Banques : résilience éprouvée, défis renouvelés

Malgré un contexte économique incertain (stress hydrique, tensions inflationnistes et risques géopolitiques), les banques marocaines ont maintenu leur croissance en 2024. Le secteur reste solide face aux stress tests de solvabilité, avec des ratios de liquidité conformes aux exigences réglementaires. Tour d’horizon avec Benallal Gada, directeur Stratégie, Transformation et Gouvernance, BMCI Groupe BNP Paribas.

 

Propos recueillis par Y. Seddik

 

 

 

Finances News Hebdo : Face à un environnement économique marqué par des incertitudes (notamment la récurrence des années de sécheresse et les risques géopolitiques), comment la BMCI évaluet-elle la solidité du secteur bancaire marocain ?

Benallal Gada : Dans un contexte économique empreint d’incertitudes et marqué par l’aggravation des risques climatiques et du stress hydrique, la dissipation progressive des tensions inflationnistes et la montée des risques géopolitiques, le secteur bancaire marocain a su faire preuve de résilience en 2024 en maintenant son trend de croissance et en démontrant une solide capacité d’adaptation face aux défis émergents. Grâce à une politique monétaire accommodante, la dynamique du crédit bancaire au Maroc n’a globalement pas été entravée par le contexte marqué par des incertitudes persistantes. Les banques ont su ajuster leur modèle en privilégiant une gestion proactive des risques et en maintenant des performances financières robustes. Ainsi, les crédits bancaires ont connu une croissance de 4,6% en 2024, bien que disparate en fonction des segments de clientèle et des types de crédits. En 2024, les crédits à l’équipement ont constitué le principal moteur de cette dynamique, enregistrant une hausse de 18%, portée par un regain d’appétit des entreprises privées. Cette tendance devrait s’accentuer dans les années à venir, stimulée par le virage entrepris actuellement dans le développement du Royaume, notamment avec l’organisation de la Coupe d’Afrique 2025, la Coupe du monde 2030 et les nombreux projets stratégiques et structurants prévus dans les prochaines années. Lesquels projets impacteront positivement la croissance des crédits bancaires; notamment dans le BTP, les énergies renouvelables et l’industrie manufacturière. Par ailleurs, les crédits à la consommation sont restés atones, en raison de l’attentisme des acquéreurs ayant conduit plusieurs ménages à différer leurs décisions de financement en 2024 suite à la baisse des taux. Parallèlement, les crédits de trésorerie ont continué de pâtir des effets de l’amortissement des crédits Damane Oxygène, Relance et autres, et de la transmission rapide de la hausse des taux débiteurs sur ce segment. Ils ont ainsi enregistré une quasi-stagnation sur l’année 2024.

 

F.N.H. : Les banques marocaines ont affiché des performances globalement positives en 2024. Quelles tendances majeures en matière de rentabilité et de solvabilité observez-vous en ce début d’année ?

B. G. : Portées par une conjoncture favorable, les banques marocaines s’apprêtent à traverser l’une des périodes les plus prospères de leur histoire, soutenues notamment par les grands projets d’infrastructure prévus dans le Royaume. En ce début d’année 2025, le secteur bancaire marocain devrait maintenir sa solidité robuste et poursuivre sa dynamique de rentabilité, bénéficiant d’un environnement opérationnel plus favorable, de la création d’activité et d’une croissance économique supérieure à la moyenne de la région MENA. Les prévisions pour 2025 tablent ainsi sur une hausse notable des bénéfices nets des banques, portée par l’essor des crédits, en particulier ceux destinés à l’équipement, ainsi que par la reprise des investissements immobiliers, soutenue par des programmes gouvernementaux. En parallèle de cette rentabilité accrue, l’exercice de macrostress test de solvabilité continue de montrer la résilience du secteur bancaire face aux scénarii de chocs, avec un ratio de liquidité à court-terme demeurant supérieur au seuil réglementaire.

 

F.N.H. : Le digital et les fintechs transforment le paysage bancaire. Comment la BMCI adapte-t-elle son modèle pour préserver sa compétitivité face à ces évolutions ?

B. G. : Face à la transformation numérique du paysage bancaire, la BMCI adapte son modèle pour maintenir sa compétitivité en intégrant plusieurs solutions digitales innovantes, nous en citons :

• Dans le cadre de son engagement continu en faveur de l’Open innovation et du développement durable, la BMCI a lancé en 2024 le Greentech Roadshow, un concours d’envergure nationale visant principalement les startups opérant dans le bas carbone, l’économie bleue et l’agritech;

• Dans la continuité de sa stratégie d’innovation, la BMCI a inauguré en 2024 son DesignLab, un accélérateur d’innovation au service de l’écosystème entrepreneurial et de la transformation digitale de la banque. Espace inspirant et fonctionnel, le DesignLab met à disposition des espaces collaboratifs favorisant la co-création et le développement de nouvelles solutions. Il accompagne les startups en partenariat avec des incubateurs, universités et cités de l’innovation, contribuant ainsi à l’émergence de projets à fort impact;

• Quelques projets nés de l’Open Innovation ont également connu une accélération rapide cette année, permettant ainsi de reprendre le fil de nos collaborations prometteuses avec des startups marocaines très prometteuses (Intelligence artificielle, solutions plug and play, solutions financières à impact social…);

• L’enrichissement de l’application BMCI Connect avec l’intégration de nouvelles fonctionnalités ainsi que l’optimisation continue de l’application. Ces initiatives témoignent de l’engagement de la BMCI à intégrer les technologies numériques pour offrir des services bancaires modernes, sécurisés et accessibles, répondant ainsi aux attentes des clients et aux défis du marché.

 

F.N.H. : Avec une accélération prévue de la croissance des crédits à 6% en 2025, quels sont les segments de clientèle et les produits de financement que la BMCI souhaite renforcer en priorité ?

B. G. : Dans les années à venir, nous restons fermement engagés à poursuivre notre trajectoire de croissance maîtrisée, en nous appuyant sur notre expertise, notre solidité financière et notre engagement en matière de finance durable. Nous continuerons à accompagner nos clients de manière proactive et en étroite collaboration dans la concrétisation de leurs projets, qu’ils soient personnels ou professionnels. Ainsi, l’année 2025 sera une année charnière pour la BMCI, visant à consolider son élan de croissance connu depuis 2023. Pour y parvenir, nous misons sur notre modèle intégré, véritable atout de notre Groupe. Nous choisissons ainsi d’investir sur un accompagnement diversifié des clients particuliers sur différents segments, tout en renforçant notre soutien aux entreprises à travers l’ensemble du tissu économique marocain, qu’il s’agisse de multinationales, de PME locales, de MidCaps, de grandes entreprises ou d’institutionnels. Par ailleurs, le volet ESG demeurera une priorité majeure, compte tenu des engagements pris par le Royaume en faveur de la neutralité carbone et de l’inclusion sociale, de l’expertise du Groupe sur le sujet ainsi que des perspectives issues du Sustainable Finance Forum organisé début 2025 par la banque. Enfin, en capitalisant sur son expertise dans les marchés financiers, la BMCI développera son activité de trading sur les desks de change, taux et dérivés, afin d’offrir à ses clients des solutions toujours plus innovantes et plus adaptées à leurs besoins.

 

F.N.H. : Alors que la capitalisation des banques de la place reste un enjeu clé selon Fitch, comment la BMCI assure-t-elle un équilibre entre croissance des crédits et renforcement de ses fonds propres ?

B. G. : Pour maintenir un équilibre entre la croissance des crédits et le renforcement de ses fonds propres, la BMCI a mis en place une stratégie financière rigoureuse, une gestion prudente des risques et de la liquidité et une meilleure capacité de génération de capital. Cette approche vise à soutenir l’expansion saine de ses activités de crédit tout en consolidant sa solidité financière. Dans le même registre, la banque a émis en septembre 2024 des obligations subordonnées d’un montant global de 1,5 milliard de dirhams pour le rachat de dettes. Une opération de refinancement inédite ayant pour objectif principal de renforcer les fonds propres réglementaires, optimisant ainsi la gestion du passif tout en améliorant les ratios prudentiels de la banque, et de soutenir le développement de ses activités. En parallèle, la BMCI veille également à préserver des ratios de liquidité conformes aux exigences réglementaires, garantissant ainsi une capacité adéquate à honorer ses engagements tout en soutenant l’expansion de son portefeuille. En parallèle, la banque a mis en place des mécanismes robustes de gestion des risques, incluant des stress tests réguliers et une surveillance accrue des indicateurs financiers, afin d’anticiper et de mitiger les potentielles vulnérabilités liées à la croissance des encours. 

 

 

 

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