◆ En 2020, les banques ont distribué 41 milliards de DH, dont 41% sous forme de facilités de trésorerie.
◆ Analyse des grandes tendances du crédit bancaire en 2020.
Par Y. Seddik
Résolument, la production des prêts bancaires a tenu tête à la crise en 2020. Les banques ont distribué quelque 41 milliards de DH aux agents économiques, permettant de fait de maintenir l’économie du pays à flot. D’une année à l’autre, la croissance des crédits bancaires s’est chiffrée à 4,5% pour un encours total de 958 milliards de DH. Bien sûr, l’évolution globale recouvre plusieurs disparités qui méritent d’être relevées. Ils auront fait office de morphine pour les entreprises marocaines: l'an dernier, les prêts garantis par l'État, développés par la CCG et distribués par les banques pour compenser la chute de l'activité économique et financer les besoins en fonds de roulement, ont fait tourner le crédit à court terme à un rythme rarement observé.
Sur l'ensemble de l'année passée, le flux de crédits adressés aux sociétés a atteint 16,69 milliards de DH, soit une progression de 8,8%. Pour avoir un ordre de grandeur, ce chiffre représente plus de 41% du total des crédits distribués en 2020. Le secteur tertiaire, notamment le tourisme (hôtels & restaurants), a le plus bénéficié de ces dispositifs avec un total de 9,16 milliards de DH de facilités de trésorerie, selon les chiffres de BAM. Les caisses du secteur industriel du pays, elles, ont été alimentées à hauteur de 7,2 milliards de DH.
Crédits à la consommation : en berne
Si les banques étaient permissives sur ce segment de crédit grâce à la garantie étatique, il n’en est pas de même pour les prêts à la consommation. Véritable pouls de la demande intérieure, ces derniers ont reculé de 4,2% sur l’année.
Leur encours global tourne autour des 54 milliards de DH. Manque de visibilité des ménages, pertes d’emplois (432.000 en 2020), des organismes de crédits plus regardants sur les critères d’octroi, sont autant de motifs (du côté de l’offre et de la demande) qui expliquent ce tassement. Et ce, alors que les taux appliqués par les banques ont baissé de 28 pbs au troisième trimestre. Mais, rappelons-le, les banques sont aussi confrontées aux exigences sur les provisions. Et au cas où elles souhaiteraient conserver un niveau de rentabilité inchangé, elles devront réclamer un surcoût de rémunération aux débiteurs et restreindre les financements.
Créances en souffrance : là où le bât blesse
Cela va sans dire que la crise économique induite par la pandémie n’a pas été sans dommage collatéral. Les créances en souffrance (CES), bête noire du système bancaire, ont culminé à 80 milliards de DH, avec un surplus de 10 milliards de DH entre décembre 2019 et décembre 2020. Le taux de sinistralité s’est situé à 8,4%.
C’est un peu le prix à payer pour maintenir l’économie sous perfusion. Cette situation nous rappelle ainsi la nécessité d’accélérer le projet de création d’une structure de défaisance et/ou d’un marché secondaire des CES, déjà à l’étude chez la Banque centrale.
Les banques participatives en vedette
Discrètes depuis le début de la crise, les banques participatives ont surtout contribué au financement de l’habitat en 2020. Sur ce segment, elles ont en effet réalisé une part de marché de près de 50%. Plus en détail, les banques marocaines (conventionnelles & participatives) ont produit 7,3 milliards de DH de prêts destinés au financement de l'habitat à fin 2020. La moitié de ces prêts provient des banques participatives. Dit autrement, près de 1 DH sur 2 vient des financements participatifs, soit 3,5 milliards de DH.
Cette production porte l'encours total des financements participatifs à l'habitat à 11,3 milliards de DH depuis le démarrage des banques participatives. Notons que ces encours sont en hausse de 45% sur l'année 2020, quand les financements classiques à l'habitat ne progressent que de 3,4%. Les financements participatifs, toutes catégories confondues, se chiffrent à 13,5 milliards de DH, en hausse de 48% en 2020. Cette prouesse a été réalisée malgré un manque cruel de ressources à vue puisqu'à fin 2020, les dépôts à vue auprès de ces banques ne dépassaient pas les 4 milliards de DH.
Cette situation les a contraintes à faire appel à la Wakala bil Istithmar et aux dépôts à vue reçus des banques-mères pour 4,8 Mds de DH. Ceci, alors que les dépôts d'investissement, qui permettent de mobiliser une épargne rémunérée auprès des clients, ont atteint un encours de 894 MDH.