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Assurances / Zlecaf : «Il faut une harmonisation progressive des cadres réglementaires»

Assurances / Zlecaf : «Il faut une harmonisation progressive des cadres réglementaires»

Les compagnies d’assurances et de réassurance souhaitent se positionner dans la chaîne de valeur de la Zone de libreéchange continentale africaine (Zlecaf). Jusqu’où peut aller l’intégration du secteur de l’assurance dans ce cadre? Eléments de réponse avec Ouafae Mriouah, CEO de la Société Centrale de Réassurance.

 

Propos recueillis par Désy M.

Finances News Hebdo : Quels sont les principaux défis auxquels le secteur de l’assurance africain fait face pour s’intégrer pleinement dans le cadre de la Zlecaf ?

Ouafae Mriouah : Le secteur de l’assurance et de la réassurance africain rencontre plusieurs défis majeurs pour s’intégrer pleinement dans le cadre de la Zlecaf. Parmi ces défis, les divergences réglementaires occupent une place centrale, fragmentant le marché et compliquant les initiatives d’intégration.   Les exigences différentes en matière de capital, de solvabilité et de normes comptables entraînent des disparités entre pays. Par exemple, certains pays adoptent des réglementations comparables à Solvabilité II, tandis que d’autres se contentent d’exigences minimales. Par ailleurs, l’absence d’uniformité dans les normes comptables, où coexistent IFRS et des standards locaux, complique l’analyse et la comparaison des performances financières. En outre, la régulation de la tarification oscille entre des régimes rigides et des marchés plus déréglementés, ce qui nuit à l’efficience globale du secteur.   Ces divergences augmentent les coûts de conformité, freinent les investissements transfrontaliers et réduisent les opportunités de coopération régionale. Pour relever ces défis, il est indispensable de travailler à une harmonisation progressive des cadres réglementaires, en favorisant une approche inclusive et coordonnée à l’échelle continentale.  

 

F.N.H. : Quels ajustements réglementaires ou institutionnels seraient nécessaires pour harmoniser les cadres juridiques des assurances entre les différents pays membres de la Zlecaf ?

O. M. : Pour harmoniser les cadres juridiques des assurances dans le contexte de la Zlecaf, plusieurs ajustements réglementaires et institutionnels sont nécessaires. Ces ajustements doivent à la fois respecter les spécificités locales et promouvoir une convergence progressive.   Les priorités incluent : • Créer une instance continentale de coordination,  qui superviserait les réformes réglementaires et assurerait leur cohérence avec les objectifs de la Zlecaf. • S’appuyer sur les structures existantes, comme la CIMA ou la CEDEAO, pour élaborer des normes communes et renforcer les synergies avec les organisations régionales. • Adopter un cadre réglementaire minimal,  en établissant des standards de base en matière de solvabilité, de gouvernance et de transparence financière, tout en offrant des périodes transitoires aux pays les moins avancés et en leur apportant de l’assistance technique pour renforcer leurs capacités régulatrices. • Favoriser un dialogue inclusif, en impliquant les régulateurs, les compagnies d’assurances, les réassureurs, les assurés, les intermédiaires … afin que les réformes soient adaptées aux réalités locales. Ces mesures permettront de réduire les disparités actuelles, d’encourager les investissements transfrontaliers et de poser les bases d’un marché d’assurance intégré et durable en Afrique.  

 

F.N.H. : Comment les compagnies d’assurances peuventelles tirer parti de la libéralisation des échanges et des services pour étendre leur couverture au niveau continental ?

O. M. : La Zlecaf offre aux compagnies d’assurances et de réassurance africaines une opportunité unique de développer leur présence sur le continent en profitant de la libéralisation des échanges et des services. Avec un marché africain de l’assurance estimé à 64 milliards de dollars (soit seulement 0,9% du marché mondial malgré 17% de la population mondiale), le potentiel de croissance est immense.  Le faible taux de pénétration de 3,5% en moyenne cache d’importantes disparités : hors Afrique du Sud, ce taux chute à 1,2% en 2023. Ce constat reflète un déficit important en matière de couverture et de protection, que les assureurs peuvent combler en explorant les marchés sous-assurés ou émergents. Grâce à la libéralisation, les assureurs pourront pénétrer de nouveaux marchés, diversifier leurs portefeuilles et offrir des produits adaptés aux besoins locaux, tout en bénéficiant d’une plus grande compétitivité et d’une réduction des barrières commerciales. Cette dynamique favorisera également les synergies régionales, l’échange d’expertises et la création de champions continentaux capables de rivaliser avec les leaders mondiaux.  

 

F.N.H. : Dans quelle mesure le secteur de l'assurance pourrait-il contribuer à la résilience économique des entreprises africaines face aux risques transfrontaliers amplifiés par la Zlecaf ?

O. M. : Le secteur de l’assurance, et particulièrement la réassurance, joue un rôle clé dans la résilience économique des entreprises africaines face aux risques transfrontaliers. Ces risques, comme les catastrophes naturelles, les risques techniques, ou les cyberattaques, s’intensifient avec l’intégration des marchés.   En mutualisant les risques à une échelle plus large, la réassurance offre une capacité accrue de protection. Par exemple, la gestion des inondations – l’un des périls les plus fréquents en Afrique – nécessite des approches régionales coordonnées. Les pools de risques, qui mutualisent les ressources, et l’expertise entre plusieurs pays, constituent une réponse efficace. La Zlecaf amplifie les opportunités, mais aussi les défis pour les entreprises. Elles auront besoin d’une couverture renforcée pour sécuriser leurs opérations et développer leurs activités à l’échelle continentale. Ainsi, en soutenant les entreprises dans la gestion des risques transfrontaliers, le secteur de l’assurance contribue non seulement à leur résilience, mais aussi au développement économique durable du continent africain.   En tant que réassureur, la SCR s’engage à fournir des solutions innovantes et adaptées, tout en jouant un rôle actif dans ces initiatives régionales. 

 

 

 

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