Réunis en conclave à Tanger durant deux jours, les dépositaires centraux des pays d’Afrique et de la région MENA ont passé en revue, avec Maroclear, les défis futurs qui attendent leur profession. Parmi les sujets débattus, la révolution technologique Blockchain est de loin la préoccupation principale des intervenants.
A Tanger, où se déroulait la 23ème conférence de l’AMEDA (Association des dépositaires centraux d’Afrique et de la région MENA), le mot est sur toutes les lèvres. Et en coulisse, café à la main, on ne parle que de cela : la Blockchain. Ce mot qui n’évoque pas grand-chose pour les profanes, est pourtant «le» sujet du moment qui hante l’esprit des financiers. «Il s’agit d’une technologie révolutionnaire, au moins aussi puissante que l’apparition d’Internet il y a déjà 40 ans. On sait que c'est l'avenir, mais on ne sait pas où ça va nous mener», lance, non sans enthousiasme, un dirigeant de Maroclear.
La Blockchain, c’est quoi au juste ? Pour faire court, il s’agit d’un système de base de données distribuée, c’est-à-dire un grand livre comptable ouvert, qui permet de rendre infalsifiable l’historique des transactions. Avec un système centralisé, les transactions sur titres sont enregistrées dans un livre de comptes détenu par un tiers (Maroclear par exemple) sur lequel repose la confiance des utilisateurs. Avec un système décentralisé, le livre de comptes est détenu par l’ensemble des utilisateurs, ce qui le rend impossible à falsifier, et permet de se passer d’un tiers en charge de la validation et de l’historique des transactions. L’une des applications de cette technologie est le bitcoin, la fameuse monnaie digitale. Mais les applications dans le monde de la finance sont innombrables.
Une rupture technologique majeure
«Cette technologie représente un nouveau paradigme et va fondamentalement changer la façon dont opère le monde financier», prévient Monica Singer, PDG du dépositaire centrale sud africain, qui avoue passer son temps libre à tenter de cerner cette nouvelle technologie et dévorer toute la littérature qui sort sur le sujet. «La Blockchain est à la finance ce que Uber et Airbnb est à certaines industries : une rupture (disruption en anglais) majeure», souligne-t-elle. Parmi les avantages de cette technologie, citons la transparence, les économies réalisées sur les opérations de règlement-livraison, en plus de la rapidité des transactions.
C’est ce qui explique qu’un grand nombre de régulateurs dans le monde ont annoncé le lancement de recherche et d’études poussées sur la Blockchain pour mesurer l’impact d’une telle technologie sur les marchés de titres et ne pas se retrouver dépassés. Les dépositaires regroupés au sein de l’AMEDA ne sont pas en reste, et voient cette technologie plus comme une opportunité que comme une menace, pour peu qu’elle soit appréhendée à temps. Parmi les recommandations émises à Tanger, figurent d’ailleurs celle de former un groupe de travail dédié à la Blockchain et de partager expériences et recherches sur le sujet. Plus que cela, il faudra dès maintenant inculquer aux parties prenantes du marché financier marocain la culture du changement et de la mutation technologique. Gageons que la Blockchain sera au coeur des prochains séminaires et débats qui animeront la place casablancaise.
Amine El Kadiri