Délais de paiement très longs, défaillances, posture attentiste sont autant d’éléments qui caractérisent la situation des entreprises marocaines, et ce dans une conjoncture économique favorable, marquée par un taux de croissance relativement élevé.
Lors de la conférence de presse tenue récemment à Rabat, à l’issue du troisième Conseil de Bank Al-Maghrib, la politique monétaire, a, comme à son habitude, dominé les échanges entre Abdellatif Jouahri, patron de l’Institut d’émission, et les représentants de la presse nationale. Cela dit, la situation des entreprises marocaines avait amplement dominé les débats. «Les délais de paiement très longs pénalisent considérablement les entreprises, notamment les TPME», martèle le gouverneur de la Banque centrale. Cette situation est assez paradoxale, d’autant plus que la loi 32-10 portant sur les délais de paiement au Maroc est entrée en vigueur. En effet, celle-ci limite les délais de paiement à 90 jours au grand maximum. Le constat actuel montre que les opérateurs économiques font allègrement fi de ce dispositif, qui était censé apporter un ballon d’oxygène à la trésorerie des PME, qui ne cesse de se fragiliser. Contactée par nos soins, Amina El Ouazzani Touhami, patronne de la société Omnium technologie, confie que l’application des délais de paiement assortie de sanctions (pénalités), s’avère difficile au Maroc pour des raisons culturelles. «Certaines entreprises n’appliquent pas les pénalités de retard de peur de perdre leurs clients, qui voient d’un mauvais oeil ce nouveau dispositif», assure-t-elle. Outre les délais de paiement, source d’inquiétude de la Banque centrale, la décélération des crédits, dont le rythme de croissance est de 2,3% au mois d’août 2015, interpelle à plus d’un titre le gouverneur de Bank Al-Maghrib. En effet, cette perte de vitesse des crédits bancaires est la résultante de la baisse de la demande des entreprises. En d’autres termes, malgré la bonne tenue de l’activité économique au cours de cette année, les entreprises ont de moins en moins recours aux facilités de trésorerie et aux crédits d’équipement, principal baromètre de l’investissement. «Nous cherchons les raisons de cette situation loin d’être rassurante», concède Jouahri, qui s’interroge sur l’effet des élections pouvant conduire les entreprises à adopter un comportement attentiste. Cela dit, la rencontre avec la presse nationale était l’occasion pour l’autorité monétaire de passer en revue les efforts déployés en faveur des TPME. En effet, dans l’optique de faciliter l’accès de cette catégorie d’entreprises au financement, BAM est prête à relever le montant alloué au Fonds de garantie dédié aux TPME jusqu’à 4 Mds de DH. L’autre paramètre pénalisant pour certaines entreprises est la contraction de la demande extérieure, qui a particulièrement impacté la branche du textile. En définitive, malgré des prévisions tablant sur un taux de croissance de 4,6% du PIB, en 2015, force est de reconnaître que la situation des entreprises marocaines est loin d’être reluisante comme en témoigne l’augmentation des défaillances. Une non-corrélation (taux de croissance crédits) qui suscite beucoup d'interrogations. Qu’en sera-t-il pour les entreprises en 2016, année qui sera probablement marquée par une croissance atone (2,4%) ? En tout état de cause, difficile d’être optimiste au regard des prévisions.
Paroles de pro
Najib Abouloula,
Directeur de Concept Automation
«La croissance économique est une chose, la conjoncture en est une autre. Aujourd’hui, les donneurs d’ordre ont bloqué leurs investissements. Ce qui fait que les entreprises évoluant dans diverses branches d’activités connaissent des difficultés au niveau financier et en ce qui concerne les projets. A mon sens, les entreprises recourent de moins en moins aux crédits bancaires en raison de l’absence de projets (extension de la société, recherche de nouveaux clients, etc.), favorisée par une conjoncture difficile. Aujourd’hui, il est de plus en plus difficile pour une entreprise, quel que soit son domaine d’activité, de tirer son épingle du jeu. Au niveau de notre société, nous avons senti ce vent défavorable depuis cinq mois. Actuellement, nous gérons des projets dont les commandes datent du début de l’année. L’autre facteur assez problématique pour les entreprises, est le retard des paiements, avec des délais de règlement très longs. Nous sommes particulièrement réticents par rapport aux projets publics en raison des retards de paiement particulièrement importants. En l’absence d’une importante assise financière, il est impossible pour une PME de supporter ces délais, qui ne cessent de s’étirer. Pour l’instant, notre structure a décidé de ne plus prendre part aux projets publics, en attendant d’avoir une meilleure visibilité sur les délais de paiement».
Infos pratiques
Maroc PME : Une nouvelle identité cadrant avec les nouvelles ambitions
La nouvelle action de Maroc PME s’arrime sur l’ambitieux Plan d’accélération industrielle (PAI), qui devrait précipiter le pays sur les voies de l’industrialisation. Avec le nouveau cadre de référence axé sur le PAI, l’entité dirigée par Larbi Benrazzouk compte adapter les programmes de soutien aux PME. De plus, Maroc PME ambitionne de mettre en place un dispositif de soutien aux TPE, conçu dans l’optique de développer l’esprit entrepreneurial et la croissance des TPE. Les autres objectifs majeurs sont le déploiement du statut de l’auto-entrepreneur et la mise en place d’un nouveau cadre juridique pour la création d’un environnement entrepreneurial propice à la création de micro-entreprises. Cela dit, le nouveau cadre de référence, orienté sur le PAI, et les nouveaux challenges ont poussé l’entité, dont la date de création remonte à 2002, à se doter d’une nouvelle identité visuelle symbolisant le changement et un nouveau positionnement. Doté d’un nouveau logo, Maroc PME fait coïncider sa nouvelle signature avec ses nouveaux axes d’intervention qui concernent l’entrepreneuriat, la croissance et la compétitivité. A ce stade, il convient de préciser que «Maroc» détermine clairement la nationalité de l’Agence ainsi que son appartenance, tandis que «PME» spécifie de façon édifiante son champ d’intervention et d’action.
Momar Diao