Annoncée en fin d’année dernière par le gouvernement, la décompensation du sucre n’aura finalement pas lieu en 2016. En période d’année électorale, difficile de faire passer une telle mesure.
Pas de décompensation du sucre en 2016. Bonne ou mauvaise nouvelle? La réponse diffère selon que l’on se place du côté du consommateur ou de celui des finances publiques. En tout cas, Abdellatif Jouahri, Wali de Bank Al-Maghrib, a fait savoir lors de sa dernière sortie médiatique, que la décompensation du sucre ne sera pas pour cette année. Interrogé sur la question par les journalistes, il a malicieusement répondu, tout sourire, qu’en période d’année électorale, une telle décision est difficile à prendre. D’ailleurs, les prévisions d’inflation de la Banque centrale pour l’année en cours ne tiennent pas compte de cette éventuelle décompensation.
Pourtant, en fin d’année dernière, le Chef de gouvernement, Abdelilah Benkirane, avait annoncé à la télévision que la décompensation du sucre allait être entamée dès 2016, et ce de manière progressive. «Chaque mois, 10 à 15 centimes de compensation par kilo de sucre seront supprimés, durant une période totale de 18 mois», avait-il notamment précisé. Rappelons que la décompensation doit se faire par voie réglementaire et non par une loi. Il faut croire que ce décret pourrait être renvoyé aux calendes grecques. Le Maroc est l’un des plus gros consommateurs de sucre au monde, avec 36 kilos par an et par habitant. Plus de la moitié du sucre consommé est importé et la subvention a coûté aux caisses de l’Etat près de 3,2 milliards de DH en 2014.
La décompensation du sucre devait permettre, selon le Chef de gouvernement, de réaliser une économie de 2 milliards de DH, dont la moitié devait aller au secteur de la Santé pour l'équipement des hôpitaux des zones les plus reculées, tandis que l'autre moitié est destinée à alimenter le Fonds de solidarité sociale pour venir en aide aux veuves et aux personnes à besoins spécifiques.
Ce recul du gouvernement peut néanmoins s’expliquer par la forte hausse des cours du sucre sur les marchés mondiaux depuis quelques mois. En cause : le déficit mondial prévu à 3,5 millions de tonnes en novembre dernier, a été revu par l’organisation internationale du sucre à plus de 5 millions de tonnes.
Les cours du sucre se trouvent actuellement à leurs plus hauts niveaux depuis novembre 2015. Lancer la procédure à un tel niveau de cours relèverait du «suicide politique» pouvant provoquer le mécontentement des électeurs qui subiraient une baisse de plus de leur pouvoir d’achat. La tâche incombera donc au prochain gouvernement issu des élections législatives d’octobre 2016.
Amine El Kadiri