Fortunes diverses pour les économies des pays de la zone MENA en 2017. Les pays exportateurs de pétrole de la région et les pays importateurs enregistrent en effet des trajectoires de croissance bien différentes : pour les premiers, la croissance moyenne du PIB ne devrait pas excéder 1,7%, tandis que pour les seconds, elle devrait atteindre 4,3%. C’est ce qu’a indiqué cette semaine à Rabat Jihad Azour, directeur du département «Moyen-Orient Afrique et Asie Centrale» du Fonds monétaire international (FMI).
«L’élan économique mondial ne se reflète pas sur la région MENA à cause des prix bas du pétrole et des impacts économiques et sociaux des conflits dans plusieurs pays de la zone (Irak, Syrie, Yémen, Libye)», a ainsi déclaré Azour.
La situation, notamment pour les pays exportateurs de pétrole (Algérie, Arabie Saoudite, Libye, etc.) pourrait s’améliorer à moyen terme, mais cela restera insuffisant pour résorber le problème du chômage, notamment celui des jeunes et des femmes, qui demeure à des niveaux élevés. Ces pays devront, selon le responsable du FMI, accélérer le chantier des réformes structurelles, diversifier leur offre, améliorer leurs équilibres macroéconomiques ainsi que le climat des affaires.
La relative bonne santé des pays importateurs de pétrole, dont le Maroc fait partie, devrait se poursuivre dans les années à venir. A moyen terme, la croissance de ces pays devrait afficher une moyenne de 5,3% sur la période 2019-2022, alimentée par la demande intérieure et les exportations.
Cela reste cependant insuffisant, fait remarquer Azour : «ces taux ne suffiront pas à créer des emplois à une échelle capable de combattre le chômage actuel ou d’absorber les millions de jeunes qui arriveront sur le marché du travail dans les prochaines années. Il faudra pour cela des croissances de 6% à 6,5%».
Dans les 5 années à venir, le FMI prévoit l’arrivée de plus de 25 millions de personnes sur le marché du travail dans la région MENA. C’est dire l’ampleur du défi.
L’institution recommande donc de réaliser des réformes structurelles «ambitieuses» de manière à renforcer l’attractivité du secteur privé. Les réformes du marché du travail et de l’éducation, l’amélioration de la productivité, ainsi qu’un meilleur accès au financement auront également un grand rôle à jouer, estime-t-on du côté du FMI.
Du positif tout de même
Le tableau n’est cependant pas si noir pour les pays importateurs de pétrole de la région MENA. Des choses positives ont été réalisées, à l’image des efforts dans la diversification économique de certains pays comme le Maroc. Le responsable du FMI cite également le développement de partenariats avec l’Afrique, qui représentent autant d’opportunités d’investissement.
La probabilité d’une reprise plus forte de l’activité de la zone Euro et dans d’autres pays partenaires commerciaux contribuerait par ailleurs à impulser la croissance dans la région.
L’environnement mondial n’est toutefois pas exempt de risques susceptibles d’entraver cette dynamique.
Ces risques concernent au premier chef les conflits régionaux et la situation sécuritaire, ainsi que «l’éventualité d’un durcissement plus rapide des conditions financières mondiales et des politiques protectionnistes de certains pays avancés».
«Flexibilité du DH : le Maroc est prêt»
Jihad Azour a abordé la question de la migration graduelle du Dirham vers plus de flexibilité, qui a fait l’objet d’un report de dernière minute en juillet dernier. Selon lui, «Le Maroc est prêt. Nous l’avons aidé dans les préparatifs et le cadre macroéconomique. Les réformes qui ont été entreprises, ont permis de renforcer la stabilité financière du pays».
Toutefois, rappelle-t-il, la décision du timing et de l’approche de cette réforme reste une décision qui relève du gouvernement. «C’est une décision souveraine», a-t-il soutenu à plusieurs reprises.
Le responsable du FMI n’a pas manqué d’ailleurs de souligner que les réformes adoptées en matière de régime de change par la Tunisie puis l’Egypte commençaient à produire des effets encourageants sur les économies des deux pays. Un fait qui préoccupe déjà Abdellatif Jouahri. En septembre dernier, le wali de Bank Al-Maghrib avait en effet confié que la Tunisie et l’Egypte, deux concurrents économiques du Maroc dans la région, avaient pris de l’avance sur le Maroc en matière de régime de change, et qu’il ne fallait pas traîner davantage pour engager la migration vers plus de flexibilité de notre monnaie. «Plus on attend, plus le retard sera difficile à rattraper», avait-il alerté.
A.E