Investissements chinois : 200% de croissance

Investissements chinois : 200% de croissance

Moulay Hafid Elalamy

Le Royaume a enregistré un important saut qualitatif et quantitatif dans les domaines économique et industriel au cours de ces dernières années. Ce progrès tangible lui confère un statut de choix, celui d’être pour la Chine, ses entreprises et ses parcs industriels, une plate-forme régionale compétitive. La montée en puissance des IDE chinois au Maroc est confortée par leur rythme de progression spectacu­laire (+195% entre 2011 et 2015). Moulay Hafid Elalamy, ministre de l’Industrie, du Commerce, de l'Inves­tissement et de l'Economie numérique, décrypte l’alliance stratégique entre le Royaume et l’Empire du Milieu.

 

Finances News Hebdo : Il est souvent ques­tion dans vos différentes allocutions de pré­senter le Maroc comme une destination cré­dible susceptible de capter des emplois que la Chine délocalisera au cours des années à venir. Qu'est-ce qui justifie votre approche ?

Moulay Hafid Elalamy : Avec la Chine, nous sommes actuellement engagés dans un partenariat économique et industriel renforcé; un partenariat stratégique a été scellé lors de la récente visite de Sa Majesté en Chine, avec la conclusion d’importantes conventions. Dans le domaine industriel, nous avons conclu un mémorandum d’entente sur le déve­loppement du partenariat économique et industriel visant justement à développer les investissements industriels chinois au Maroc dans des secteurs à fort potentiel de création d’emplois et de valeur ajoutée. Un autre mémorandum d’entente avec Haite Group porte sur la création dans la région de Tanger d’un parc industriel sino-marocain destiné à accueillir, notamment, les investissements chinois.

Il est clair qu’attirer les investissements chinois est pour nous une orientation stratégique. Nous l’avons adoptée à un moment particulièrement opportun. Des changements structurels s’opèrent en Chine avec la volonté de développer fortement la classe moyenne et la demande intérieure, ce qui a induit une forte hausse des salaires. Le salaire moyen mensuel est passé de 100$ en 2010 à près de 700$ aujourd'hui, avec une perspective de doubler d’ici 2020. La Chine recherche donc des modèles plus compétitifs que le sien et procède à une relocalisation des activités productives. C’est une opportunité de taille que le Maroc compte saisir et nous en avons les capacités. La Chine a besoin de partenaires africains pour pro­duire en Afrique et le Maroc se démarque dans cette nouvelle configuration. A l’avant-garde de l’Afrique, le Royaume offre l’avantage d’être pour la Chine, ses entreprises et ses parcs industriels, une plate-forme régionale dotée de ressources humaines de qualité, aussi bien pour les cadres, les ingénieurs que les ouvriers qualifiés. Le Royaume se positionne de plus en plus comme un centre de production et d’exportation de plus en plus compétitif. Nos portes sont ouvertes à tout investissement qui profite à la Chine et crée de la valeur et des emplois au Maroc. Pour ce faire, nous menons un travail structuré depuis le lancement du Plan d’accélération industrielle (PAI) 2014-2020. Il a permis d’identifier les secteurs potentiellement aptes à l’accueil d’IDE chinois. Il s’agit notamment de l’automobile, de l’aéronautique, de l’électroménager, du textile-habillement et de l’agro-alimentaire.

F.N.H. : En termes d'investissements directs étrangers (IDE) dans le Royaume, à quel niveau se situe la Chine par rapport aux autres pays étrangers qui investissent au Maroc ? Et quels sont les secteurs qui attirent davantage les opérateurs chinois et pourquoi ?

M. H. E. : La Chine est en passe de devenir un maillon important des IDE au Maroc. Le partenariat stratégique établi entre nos deux pays lors de la dernière visite royale en Chine est appelé à intensifier cette dynamique.

Le Royaume est aujourd’hui une destination impor­tante des investissements chinois. C’est une réalité que les chiffres confirment : les IDE chinois se sont accrus de 195% entre 2011 et 2015 et sur la seule période 2013-2014, ils ont été multipliés par 5. En 2015, ces IDE ont progressé de 94%, passant de 203 à 393 MDH. En l’espace de 2 ans, la Chine a pu gagner 15 places au niveau du classement des pays investissant au Maroc, en passant de la 32ème position en 2013 à la 17ème en 2015.

Cette croissance exponentielle et continue des IDE chinois s’est traduite par des implantations structu­rantes dans divers secteurs, dont le textile-habille­ment, la métallurgie et les énergies renouvelables. Cette tendance va aller crescendo : les décideurs et opérateurs économiques chinois que nous avons ren­contrés en mai dernier et que nous recevons de plus en plus, au ministère ont décidé de faire du Maroc un partenaire privilégié.

Visiblement, le Maroc a des atouts qui intéressent la Chine : écosystèmes sectoriels performants, dispositif incitatif novateur, compétitivité logistique, proximité géographique des marchés cibles des opérateurs chinois... Notre objectif à présent est d’attirer le plein potentiel d’investissement et de faire du Maroc un acteur actif de la nouvelle dynamique de délocalisa­tion en Chine.

Les instances internationales parlent de 85 millions d'emplois qui quittent la Chine pour trouver de nouvelles plates-formes compétitives. Le Maroc se positionne bien. Nous nous en réjouissons.

F.N.H. : Quel rôle pourraient jouer les opéra­teurs chinois pour la réalisation des objectifs du Plan d'accélération industrielle ?

M. H. E. : En s’installant au Maroc, les entreprises chinoises contribuent à la valeur ajoutée nationale et créent de l’emploi; elles participent de fait aux objec­tifs généraux du Plan d’accélération industrielle.

Plus spécifiquement, la dynamique de mise en oeuvre des écosystèmes ne sera que stimulée par de nou­velles implantations chinoises qui participeront à compléter les chaînes de valeurs locales et atteindre des taux d’intégration plus importants, notamment dans l’automobile et le textile, l’amont du secteur en particulier.

Nous comptons conduire ces futurs projets dans le cadre d’un partenariat pragmatique, ouvert sur l’ave­nir et porteur de compétitivité partagée.

Propos recueillis par Momar Diao

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