Bien encadrés, les agriculteurs seront conformes à la réglementation en vigueur.
Un suivi régulier de l’activité augmentera leur revenu et la qualité des produits.
Par C. Jaidani
La légalisation du cannabis au Maroc ouvre la voie à de nouvelles perspectives très prometteuses pour la région du Rif et des Jbala. Tout d’abord sur le plan social, puisqu’une partie de la population de cette zone vit essentiellement de cette activité. Elle travaille clandestinement et en marge de la société, au point que 80.000 personnes sont recherchées par les autorités.
Sur le plan économique, la filière devrait drainer plus de ressources aussi bien pour les exploitants que pour l’Etat. Jadis, l’activité profitait en premier lieu aux narcotrafiquants et aux mafias internationales.
Avec la mise en place d’un cadre juridique et d’une agence dédiée, la stratégie nationale portant sur la réorientation de la culture du cannabis vers de nouveaux débouchés est mise sur les rails. Dans ce cadre, un plan d’action est dans le pipe. Il traduit en mesures concrètes les dispositions de la loi, notamment au niveau des cultures, de l’’exploitation, la transformation et la commercialisation du cannabis à usage médical, cosmétique et industriel.
Après l’étape législative, place à l’étape opérationnelle, qui est la plus difficile. L’entrée en vigueur des dispositions de la loi ne sera pas acceptée par tout le monde, surtout que ces dispositions imposent que la culture, la transformation et la commercialisation soient strictement encadrées par l’agence. Il faut s’attendre donc à ce que des poches de résistance à ce nouvel environnement voient le jour et soient probablement soutenues par les narcotrafiquants.
«L’Agence nationale de régulation des activités liées au cannabis doit disposer de moyens suffisants pour assurer ses attributions. Pour mener à bien ses objectifs, ses ressources humaines doivent être qualifiées et en phase avec la réalité de la population afin de tisser de bons rapports avec les personnes concernées», souligne Chakib Al Khayari, coordinateur du collectif pour la légalisation du cannabis.
En effet, la légalisation n’est pas seulement une bataille réglementaire, mais aussi économique et sociale. Car pour s’inscrire dans ce nouveau dispositif, les exploitants doivent y trouver leur intérêt. Dans son dernier rapport, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a prôné d’instaurer une stratégie intégrée englobant plusieurs aspects. Ses conclusions sont basées sur un processus d’écoute et de consultation d’acteurs institutionnels, d’experts, d’élus locaux, d’associations et de réseaux de citoyens vivant dans les zones concernées.
Cette stratégie devrait porter sur un modèle social vertueux, un système de production agroalimentaire optimisé, innovant et durable, une forme d’économie régulée sans entraves et une insertion favorable pour le Maroc dans un marché international licite en développement permanent.
«Les agriculteurs de cannabis doivent être regroupés en coopératives et associations afin de les encadrer sur le plan technique, de faire le suivi des cultures, d’utiliser les meilleures intrants, notamment les semences et les produits phytosanitaires conformément aux orientations de l’Agence nationale de régulation des activités liées au cannabis. Après les récoltes, il est recommandé de bien valoriser les produits pour assurer le meilleur revenu aux exploitants», souligne Mohamed Remahi, militant associatif dans la région de Taounate.