Ahmed Laaboudi, Directeur Général du Centre marocain de conjoncture
Le Centre marocain de conjoncture vient de publier une note de conjoncture au titre évocateur : «Croissance : 2020 année blanche».
Cette note est principalement consacrée à l'évaluation de l'impact de la pandémie du coronavirus (covid 19) sur l’économie mondiale et nationale ainsi que les effets de la sécheresse sur la campagne agricole.
«Sans précédent, le choc économique engendré par la pandémie du coronavirus (covid19) a provoqué de profonds changements dans les comportements des agents, des opérateurs économiques et des gouvernements à l’échelle planétaire et a remis en cause la mondialisation et ses bienfaits sur les économies des pays», affirme d’emblée le CMC.
De grandes incertitudes et des interrogations légitimes commencent à se poser sur de quoi demain sera fait, estime le Centre. Les craintes liées au prolongement de la crise sanitaire dans la durée et à son extension à d’autres espaces ont poussé les pouvoirs publics de l’ensemble des pays touchés à adopter des stratégies et des plans d’urgence pour freiner la maladie du covid19, et pour venir en aide aux secteurs d’activité les plus affectés (transport aérien, hôtellerie, activités liées au tourisme...) et procéder au redressement de l’économie d’une manière générale.
L’économie mondiale d’après les estimations prospectives du Centre ne connaitrait qu’un taux de croissance modeste d’environ 2%.
L’économie nationale prise en tenaille
Dans cette conjoncture internationale déprimée et altérée par l’ampleur de la crise sanitaire, l’économie nationale va être «impactée sérieusement» de par son ouverture et ses interdépendances avec le monde extérieur, affirme le CMC.
En plus, elle se trouve prise en tenaille entre les effets dévastateurs du coronavirus et la contreperformance quasiment connue du secteur agricole.
Aujourd’hui, le sérieux déficit pluviométrique constaté au cours des derniers mois préfigure, selon la même source, d’une mauvaise campagne agricole dont l’ampleur a déjà poussé le Ministère de tutelle à mettre en œuvre un plan d’urgence pour pallier le manque d’eau et protéger le cheptel.
Dans ce contexte emprunt d’incertitudes, les hypothèses qui ont présidé à l’établissement des prévisions exploratoires pour l’économie marocaine sont conditionnées par les développements rapides des évènements et par voie de conséquence demeurent assez fragiles, reconnaît le CMC.
Quelles hypothèses ?
Toujours est-il que selon le CMC, les hypothèses qui sous-tendent le scénario de référence sont les suivantes :
Une croissance inférieure à 1%
«Dans le cadre de cette panoplie d’hypothèses fragiles mais soutenables et au vu des maigres indices précurseurs, la configuration des prévisions sectorielles retenues pour le scénario de référence a permis de dégager un taux de croissance conjecturable du Produit intérieur brut à prix constants d’environ 0,8% pour l’exercice 2020», estiment les économistes du Centre marocain de conjoncture.
Cette contre-performance économique devrait découler du retrait de l’ensemble des secteurs sous les effets multiples déclenchés par la maladie du Covid19 de la psychose et de la perte de confiance en passant par les restrictions des déplacements et le confinement pour arriver au stade de l’état d’urgence sanitaire.
En dehors du secteur agricole qui devrait afficher une diminution de sa valeur ajoutée en volume d’environ 3% en raison des conditions climatiques pernicieuses enregistrées durant l’hiver, les autres secteurs devraient pâtir des dégâts causés par le coronavirus et ce à des degrés divers en accusant un ralentissement ou carrément une baisse de l’activité, souligne le CMC.
Ainsi, toujours selon le CMC, le secteur de l’hébergement et la restauration figure parmi les activités les plus touchées, sa valeur ajoutée en termes réels devrait fléchir d’environ 25 % tant la reprise serait lente et difficile.
Quant aux services de transport aussi bien aérien, ferroviaire que routier devraient marquer le pas et leur valeur ajoutée globale connaitrait une stagnation en glissement annuel.
En outre, dans cette texture anticipée de la croissance de l’économie nationale pour l’année 2020, la contribution des activités des industries manufacturières resterait modeste et se situerait en deçà des 2% aux termes de l’année; aujourd’hui certaines de ces activités peinent à trouver des marchés ou sont bloquées par manque d’approvisionnement en matière première et produits intermédiaires et d’autres sont complètement à l’arrêt comme la branche principale de l’industrie automobile.