La nomination de Mouna Lebnioury au poste de présidente du Directoire d’une Banque Populaire Régionale, en l’occurrence celle de Tanger-Tétouan, constitue une première pour la deuxième banque du Maroc. Cela sanctionne positivement les compétences d’une collaboratrice dont le mérite est avéré. Dans cet entretien, Asma Lebbar, directrice du pôle Développement du capital humain à la BCP, dévoile la politique RH de la banque qui, entre 2005 et 2015, a vu la part de l’effectif féminin passer de 35,7% à 47,6%. Dans le même temps, le taux d’encadrement féminin a pratiquement doublé à la même période, passant ainsi de 26,7% à 44,2%.
Finances News Hebdo : Que symbolise pour le Groupe Banque Populaire la nomination de Mouna Lebnioury au poste de présidente du Directoire de la Banque Populaire Régionale de Tanger-Tétouan ?
Asma Lebbar : Cette nomination est l’illustra-tion d’une importante évolution culturelle et d’une vaste transformation sociétale, dans lesquelles notre Banque s’inscrit en toute logique. Il est certain que l’émergence de la femme à tous les niveaux de res-ponsabilité tant en entreprise qu’au sein de la sphère publique est un incontestable progrès. Elle est la marque d’une avancée essentielle dans le dévelop-pement de notre pays. Tout autant, cette nomination est, encore une fois, pour notre Banque, l’expression d’une reconnaissance des mérites et des compétences avérés d’une de ses collaboratrices les plus en vue. Elle est la résultante d’un parcours personnel particulièrement perfor-mant, éprouvé par des réalisations probantes. Et ce n’est pas un fait nouveau. Depuis plus d’une dizaine d’années, des femmes sont membres de notre comité exécutif. Le grand réseau de Casablanca, regroupant pas moins de 250 agences et 8 centres d’affaires, est géré également par une femme. Un certain nombre de femmes sont aujourd’hui administrateurs au sein de conseils de différentes entités du Groupe. Si cela démontre la progression du management féminin au sein de notre Banque, cela renvoie également à l’exigence posée par notre politique des ressources humaines visant à mettre en avant les trajectoires d’excellence comme élément central de notre stra-tégie en matière de promotion de nos meilleures compétences.
F.N.H. : Votre groupe a-t-il une politique claire de promotion des femmes par le mérite ou par l'approche genre ?
A. L. : Au sein du Groupe Banque Populaire, l’approche par le mérite l’emporte naturellement sur toutes autres considérations. L’excellence mana-gériale, la contribution efficace à la performance collective, l’engagement à la réalisation des objectifs de l’entreprise sont des valeurs profondes que l’on ne peut évacuer ou omettre. Elles constituent le socle invariant sur lequel nous faisons reposer l’appré-ciation de nos collaboratrices et collaborateurs sans distinction. C’est là un élément clé de la gestion de carrières que notre Groupe prône et met en oeuvre. L’approche genre ne peut faire l’économie de cela car, en réalité, cela ne manquerait pas de déconsidé-rer les efforts que nous conduisons actuellement en faveur d’une plus grande représentativité féminine.
F.N.H. : Les métiers de la banque sont exi-geants à certains égards même, pour les hommes, et davantage pour les femmes qui assument l'essentiel des tâches familiales. Partant de ce constat, n'est-il pas difficile de facto de promouvoir les femmes aux postes de gestion et de gouvernance de la banque ?
A. L. : C’est un parti pris que de le considérer. Cela en serait même réducteur. Bien évidemment, les femmes ont un rôle social aux responsabilités élargies, mais rien n’empêche et n’empêchera la gente féminine d’accé-der aux plus hautes marches des responsabilités en entreprise. Tous les métiers sont exigeants et, malgré tout, tous demeureront accessibles. Trading, finance, informatique, gestion d’agence, audit, ressources humaines… il ne saurait y avoir de monopole mascu-lin. Et le constat est là : au niveau du Groupe Banque Populaire, plusieurs femmes mariées avec enfants occupent aujourd’hui des hauts postes de responsabili-té. C’est la preuve que les femmes qui réussissent sont souvent celles qui ont cette capacité de concilier entre leur vie personnelle et leur activité professionnelle, et qui, disons-le, ont certainement la chance de disposer du support de leur mari dans ce sens.
F.N.H. : Au niveau des indicateurs de performance, constatez-vous un écart entre les hommes et les femmes au sein de la banque ? Et qu'en est-il des écarts de salaires de ceux-ci ?
A. L. : La représentativité féminine s’améliore et progresse à tous les échelons de notre organisation. Entre 2005 et 2015, la part de l’effectif féminin est passée de 35,7% à 47,6%. Le taux d’encadrement féminin a, quant à lui, presque doublé durant cette période, passant de 26,7% à 44,2%. Aujourd’hui, les recrutements opérés au sein de la Banque Populaire se font dans un meilleur respect de la parité. Les classements académiques, notamment des grandes écoles, sont le parfait reflet de tout cela et ont un impact fort, quoiqu’indirect, sur cette mutation. A moyen terme, ce changement déjà très perceptible ne manquera pas d’être ressenti à divers échelons, y compris les plus élevés. Pour finir, la question souvent posée des écarts de salaires doit être reconsidérée puisque -en toute éthique- les grilles de salaires proposées ne sont nullement établies de manière discriminante.
Propos recueillis par Momar Diao