Le Royaume a brillé par sa posture avant-gardiste lors de la dix-septième édition du Forum pharmaceutique international qui a eu lieu récemment à Hammamet, en Tunisie. Sur bon nombre de problématiques rencontrées en Afrique (médicaments contrefaits, carence en unités de production de médicaments, etc.), l’expérience du Maroc peut valablement servir de modèle.
L’Afrique sera la nouvelle frontière économique de demain. Mais hélas !, le continent, qui abrite un peu plus d’un milliard d’âmes, devra relever plusieurs défis, dont celui de l’amélioration du système de santé, socle de tout développement économique pérenne. Au regard de ce contexte, l’organisation de la dix-septième édition du Forum pharmaceutique international (FPI) dans la station balnéaire de Hammamet en Tunisie sous le thème : «Le pharmacien au service de la santé en Afrique» était d’autant plus opportune. Cette manifestation africaine d’envergure internationale, qui a réuni pas moins de 800 pharmaciens issus du continent et de l’espace européen, a permis aux participants de débattre de thématiques cruciales à l’échelle continentale, pour ne citer que les médicaments contrefaits, l’industrie pharmaceutique et l’accès aux médicaments en Afrique.
Diagnostic édifiant
L’événement de Hammamet, placé sous le haut patronage du Président tunisien et rehaussé par la présence de Said Aïdi, ministre tunisien de la Santé, a servi de plate-forme d’identification des forces et des faiblesses de l’Afrique pour la promotion du secteur pharmaceutique au profit de la santé. En effet, près de 80% des médicaments consommés en Afrique sont importés d’ailleurs. De plus, 50% de la population africaine n’a pas accès aux médicaments de base. Ce qui soulève, selon Masna Askana, président de l’Inter-Ordre des pharmaciens d’Afrique (IOPA), les problématiques liées aux réseaux de distribution des médicaments sur le continent et le rôle du pharmacien quant à la disponibilité et à l’accessibilité de ceux-ci, dans un contexte où le numérique est un puissant vecteur de changement. Les thématiques des médicaments falsifiés, qui peuvent représenter entre 10 et 60% des produits en circulation, selon les pays en Afrique, et l’industrie pharmaceutique quasi inexistante au Sud du Sahara, hormis l’Afrique du Sud, ont suscité davantage l’intérêt des participants. Ces derniers ont toutefois réaffirmé qu’il est impérieux de renforcer la lutte avec la plus grande fermeté contre le fléau des médicaments falsifiés. Ce qui passe, entre autres, par la sensibilisation sur leur dangerosité et la création d’entités de contrôle qui doivent travailler en étroite collaboration avec les forces de l’ordre (police, gendarmerie, douane). D’ailleurs, le Royaume a présenté son expérience concluante en la matière. En effet, les autorités marocaines ont mis en place un dispositif de contrôle renforcé des médicaments, tout en pénalisant la pratique illégale de la profession de pharmacien et en interdisant les ventes de médicaments hors officines. Par ailleurs, il est important de rappeler que le développement des médicaments contrefaits (moins chers) a connu une inflation en Afrique de l’Ouest suite à la dévaluation du Franc CFA. Ce qui a naturellement conduit au renchérissement des produits pharmaceutiques importés. L’autre paramètre de nature à retarder le développement de l’industrie pharmaceutique en Afrique subsaharienne est l’absence de systèmes de couverture maladie universelle, contrairement au Maghreb. Notons dans la foulée que les industries pharmaceutiques marocaine, tunisienne et algérienne ont tiré profit de la performance de leur système de couverture maladie.
Remédier au désert d’industrie pharmaceutique
Dans le domaine pharmaceutique, la coopération Sud-Sud, dont le Royaume est un fervent promoteur, revêt un sens autrement plus important. Les pays du Maghreb, pour ne citer que le Maroc, la Tunisie et l’Algérie ont respectivement développé une industrie pharmaceutique performante leur permettant de couvrir une partie de leur besoin local, tout en exportant. «Le secteur pharmaceutique marocain (privé), qui a généré un chiffre d’affaires de 8,5 Mds de DH en 2015, tout en employant plus de 40.000 personnes au total, a été le seul de la région à avoir une certification européenne», rappelle le docteur Fatima Lahmouni. Pour certains participants, tout l’enjeu est de remédier au désert d’industrie pharmaceutique dans les pays subsahariens. Forts de leur expertise, les trois pays du Maghreb précités, qui exportent déjà dans les pays africains, ont une grande partition à jouer pour l’essor d’unités de production de médicaments au Sud du Sahara. D’ailleurs, les laboratoires marocains sont avant-gardistes en la matière puisque Sothema et Bottu ont d’ores et déjà installé des usines de production dans certains pays africains. En définitive, le FPI, qui a enregistré une forte participation marocaine (8 laboratoires) conduite par Maroc Export, a le mérite de proposer des recommandations allant dans le sens de positionner la chaîne de valeur pharmaceutique comme une force motrice de l’amélioration du système de santé en Afrique.
Le FPI, un accélérateur de ventes
Interrogée par nos soins sur la raison de sa présence au Salon d’exposition du FPI, Danielle Tobias, manager export du laboratoire Laprophan, n’y est pas allée par quatre chemins. «Cet événement continental qui permet de retrouver nos clients africains, est un accélérateur de ventes», assure-t-elle spontanément. Au-delà de l’aspect commercial, Danielle Tobias reste convaincue que la participation à ce genre d’évènement est capitale pour son laboratoire. «La confiance est un paramètre crucial dans les domaines de la pharmacie et de la médicine. Et ce genre de forum permet de la consolider auprès des pharmaciens africains venus massivement à Hammamet», poursuit-elle.
D.N.E.S en Tunisie Momar Diao