Avec la baisse de la nappe phréatique, il faut creuser plus profondément.
Une bonne partie des opérations se fait clandestinement.
Par C. Jaidani
La sécheresse qui a sévi ces dernières années a eu des effets néfastes à plusieurs niveaux. La population des agriculteurs est la plus impactée, notamment les exploitants qui opèrent dans les zones bour et les fellahs qui se basent sur l’irrigation. Dans les périmètres irrigués alimentés par les réserves des barrages, les autorités concernées ont procédé à des restrictions de la distribution de l’eau. Cette initiative a eu des effets sur le rendement et la qualité des produits. Mais les agriculteurs qui se basent sur l’irrigation à partir des puits, éprouvent beaucoup plus de difficultés.
«Il y a quelques années, la profondeur de mon puits ne dépassait pas les 60 m. Je pouvais pomper toute l’eau dont j’avais besoin. La sécheresse a réduit drastiquement le niveau de la nappe phréatique, qui est essentiellement alimentée par les eaux pluviales. J’ai foré de nouveau pour passer à 100 m. Le débit a certes augmenté, mais sans atteindre toutefois le niveau précédent. Du coup, le rendement a été revu à la baisse. Plusieurs fellahs ont dû changer d’activité agricole moins exigeante en eau pour s’adapter à la situation», indique Mostafa Zaroudi, exploitant dans les environs de Had Soualem. Les fermiers sont confrontés à d’autres contraintes, comme le coût d’exploitation en perpétuelle croissance face à des marges quasi stables, sans compter les difficultés techniques et administratives pour réaliser le forage des puits.
«L’augmentation de la profondeur peut assurer un débit plus élevé, mais parfois l’eau pompée présente un degré de salinité élevé qui est déconseillé pour les cultures, l‘abreuvage ou l’eau potable. Pour la rendre meilleure à l’utilisation, il faut la filtrer, et cela engendre des surcoûts élevés», souligne Abderrahim Mouhajir, conseiller agricole. La question du surcoût concerne également les opérateurs de forage des puits. Que ce soit pour les opérations de type classique ou le creusement par voie de sondage, les prestataires de ce genre de ce service ont augmenté les tarifs de leurs prestations.
«Tous les prix des intrants ont augmenté sensiblement : le matériel de creusage, le carburant, les tubes, que ce soit en acier ou en PVC, sans oublier le coût de la main-d’œuvre», explique Saïd Akharfi, opérateur de forage des puits. Avant de creuser, il faut toujours procéder à un sondage pour connaître la nature du sol. S’il est rocheux, l’opération est plus compliquée et le coût devient plus élevé. Sous l’effet de la sécheresse, la demande de forage des puits a augmenté sensiblement. Elle a été encouragée par les aides octroyées dans le cadre du Plan Maroc Vert (PMV) et actuellement Génération Green, dans les subventions accordées par l’Etat peuvent atteindre 60% de l’investissement.
L’Etat a facilité la procédure que ce soit pour l’autorisation de forage des puits ou la demande de subvention d’équipements des projets agricoles. Toutefois, les professionnels rencontrent divers obstacles, dont les difficultés liées aux statuts fonciers, notamment la propriété dans l’indivision, les terres collectives, habbous ou guiche. Cette situation a contraint plusieurs exploitants à des forages clandestins. Selon des données du département de l’Eau, le nombre de puits répartis sur tout le territoire national dépasse 374.000, dont 10% seulement sont autorisés. Le délai fixé pour l’obtention d’une autorisation de forage est de 40 jours. Mais ce délai peut être allongé pour différentes raisons, comme l’absence de l’aval des autres propriétaires pour les demandeurs dans l’indivision. Parfois, cette autorisation est même refusée lorsque la nappe phréatique est fortement impactée. C’est le cas à Doukkala, Abda ou Souss.