Malgré la forte imposition du secteur, sa contribution au Budget de l’Etat demeure limitée. Son faible rendement justifie les interrogations quant à l’efficacité fiscale appliquée à ce domaine. En vue d’y remédier, l’administration a instauré les prix de référence de l’immobilier et du foncier dans certaines régions. Une initiative qui, de l’avis des conjoncturistes, enfreint le choix stratégique de l’économie de marché.
Au vu des données budgétaires, la contribution de la fiscalité foncière aux finances de l’Etat reste somme toute limitée. En 2015, les recettes au titre de l’impôt sur les profits immobiliers ont représenté à peine 10% du total de l’impôt sur le revenu et près de 2% de l’ensemble des recettes fiscales. Pis encore, la tendance des recettes y afférentes s’est orientée à la baisse au cours des trois dernières années. Le même constat s’applique aux recettes de la taxe sur les terrains non bâtis (TSNB). Avec un montant global se situant en 2014 à 900 MDH, les recettes relatives à cet impôt foncier représentent à peine 13,7% du total des impôts directs locaux, avec une évolution assez fluctuante au cours des dernières années. C’est dire que le système fiscal appliqué au foncier peine à atteindre ses objectifs. Dans une récente note, les analystes du Centre de conjoncture considèrent qu’au Maroc, le foncier subit une forte pression pour un faible rendement. Contrastant avec la forte poussée que connaissent les différentes activités de ce secteur depuis plusieurs années, le faible rendement de la fiscalité foncière qui ressort de ces données justifie tous les questionnements posés quant à l’efficacité du système fiscal appliqué, et surtout sa capacité à assurer un instrument de régulation des marchés fonciers. Il semble ainsi que la forte pression fiscale exercée sur les activités du secteur et les transactions qui s’y opèrent est à l’origine de pratiques qui ne favorisent pas l’optimisation de l’allocation des ressources foncières sur les activités productives, tout en limitant l’apport du secteur aussi bien au Budget de l’Etat qu’à celui des collectivités territoriales. En guise de précision, la fiscalité s’applique à l’occasion de l’opération d’acquisition du bien foncier, durant la période de détention du bien foncier et à l’occasion de la cession. En effet, celle relative aux opérations d’acquisition des biens fonciers concerne les droits d’enregistrement et les droits de la Conservation foncière fixés, respectivement, à 6 et à 1% de la valeur de la transaction. A rappeler également que le bien foncier est assujetti annuellement aux impôts prévus dans le cadre de la fiscalité locale, en plus de l’impôt sur les revenus fonciers. En ce qui concerne la fiscalité locale, l’impôt qui s’applique aux biens fonciers est la taxe sur les terrains non bâtis. Cette taxe a pour but d’éviter la rétention foncière. Elle est fixée au taux de 4 à 20 DH le m2 pour les zones immeubles et de 2 à 12 DH le m2 pour les zones réservées aux logements individuels et aux villas.
Dans le même sillage, les analystes abordent le prix de référence du foncier et de l’immobilier appliqué par l’Administration en guise de moyen de maîtrise des déclarations relatives à l’impôt sur les profits fonciers. «Voulant affronter les pratiques d’évasion fiscales qui peuvent entacher dans certains cas les transactions foncières et protéger les intérêts du Trésor public, l’Administration fiscale a cru devoir instaurer des prix de référence du foncier et de l’immobilier dans certaines régions pour une meilleure maîtrise des déclarations relatives à l’impôt sur les prix fonciers», soulignent les conjoncturistes. Elle projette de maîtriser les recettes fiscales en se substituant au marché, avec tous les dysfonctionnements que cela engendre au plan de l’efficacité des transactions et l’allocation des ressources financières. Toujours est-il qu’il s’avère plus important de s’attarder sur la pertinence de la fiscalité elle-même, du niveau de la pression fiscale qu’elle implique et de son adaptation à la réalité du marché.
Soubha Es-Siari