Mohamed Hdid, expert-comptable, décortique la posture des partis politiques en ce qui concerne les questions fiscales.
Finances News Hebdo: Quelles sont selon vous, les mesures fiscales urgentes que le prochain gouvernement devrait prendre après les élections législatives afin d'améliorer la compétitivité des entreprises marocaines, baisser la pression fiscale jugée élevée, assurer à l'Etat suffisamment de ressources et garantir une meilleure équité ?
Mohamed Hdid: La politique fiscale est une composante importante de la politique économique générale que chaque gouvernement doit définir. Les partis politiques sont supposés disposer d’un programme incluant les mesures de politique fiscale. Il est donc inopportun de vouloir se substituer aux programmes des différents partis politiques et, par conséquent, du prochain gouvernement. Il n’en demeure pas moins que des mesures fiscales fondamentales méritent d’être soulignées. Il s’agit en particulier de l’effort d’élargissement de la base imposable pour permettre la répartition de la pression fiscale sur un grand nombre de contribuables et, par conséquent, la baisse des taux d’imposition. L’évaluation des incitations fiscales, de manière plus large, dépassant la simple acception de la dépense fiscale est également souhaitable. La poursuite de l’effort de dématérialisation est aussi nécessaire, sans oublier la clarification des textes fiscaux permettant leur application unanime et de façon uniforme par les parties prenantes.
F.N.H.: La CGEM accorde une grande importance à la mise en place de l'IS progressif. Jugez-vous pertinente cette requête ?
M. H.: Le débat de fond qui mérite d’être posé est celui qui consiste à se prononcer sur l’opportunité ou non de taux d’IS différents, ou au contraire, un taux uniforme applicable à toutes les sociétés, quel que soit le niveau du bénéfice réalisé, demeure plus équitable. Par contre, dès lors que le choix d’un taux différencié est opéré, la progressivité s’impose. Des taux différents et proportionnels sont inéquitables, nuisibles et contre-performants. Ils encouragent à rester petits contribuables, ce que les taux progressifs permettent de corriger puisque seul le bénéfice additionnel et marginal sera soumis aux taux d’impositions supérieurs.
F.N.H.: Enfin, les formations politiques marocaines accordent-elles suffisamment d'importance aux questions fiscales, notamment dans leurs programmes respectifs ?
M. H. : De par sa complexité et le niveau de technicité qu’elle exige, la fiscalité, même quand elle se trouve prise en compte dans le programme de telle ou telle formation politique, n’est pas souvent abordée dans les débats publics, hormis quelques principes généraux d’équité et de justice fiscale, mais sans aller vers des débats de compétitivité fiscale ou de compétitivité des entreprises. De manière plus générale, il semble que la fiscalité ne constitue pas le champ de bataille des formations politiques contrairement à d’autres cieux.
Propos recueillis par M. D.