La préscolarisation, conclut une récente étude du HCP, améliore le capital humain national, en augmentant le nombre moyen d’années d’études et l’espérance de vie scolaire, deux variables décisives dans le calcul de l’indicateur du développement humain (IDH). Retour sur les principaux enseignements d’une enquête basée sur les résultats du dernier Recensement général de la population et de l’habitat.
L’enseignement préscolaire réduit de moitié les déperditions scolaires, améliore la réussite, d’au moins 50%, tout au long de la trajectoire scolaire et majore significativement le capital humain et l’espérance de vie scolaire. C’est l’enseignement principal qu’on peut retenir de l’enquête du HCP sur l’enseignement préscolaire, l’un des aspects du capital humain au Maroc. Aussi surprenants soient-ils, les résultats de cette enquête montrent le caractère sélectif du secteur du préscolaire qui ne bénéficie qu’à moins de 60% des enfants à préscolariser. Outre le constat de régression marquant sa composante traditionnelle, pourtant accessible, ce secteur d’enseignement affiche, depuis la fin des années 1990, une baisse tendancielle des effectifs préscolarisés, et peine à atteindre les milieux défavorisés dont ceux ruraux. Autre fait marquant les conclusions de l’enquête du HCP : le préscolaire améliore certes le rendement scolaire, mais il ne permet pas, à lui seul, d’éradiquer les inégalités des chances vis-à-vis de la réussite scolaire. La nouvelle enquête du HCP, basée sur les données du Recensement général de la population et de l’habitat (RGPH) 2014, montre également que le milieu de résidence, le sexe de l’enfant et le niveau d’instruction des parents, constituent, à côté de la préscolarisation, des déterminants fondamentaux de la réussite scolaire. Dans le détail, en 2014, près de 995 mille enfants âgés de 3 à 5 ans ont déclaré avoir été préscolarisés, ce qui correspond à un taux de fréquentation du préscolaire de 48,7%. Le secteur d’enseignement moderne (crèche, maternelle) en préscolaire reste dominant (93,3%), suivi de loin (6,7%) du côté du secteur traditionnel (Koutab et Msid). En termes de langues d’apprentissage au préscolaire, on retrouve d’abord l’arabe seule (52,2%), suivie du français-arabe (45,5%) et, de loin, de l’anglais-français-arabe (1,3%).
Des prérequis
L’enquête du HCP montre également qu’en 2014, plus de la moitié des enfants âgés de 3 à 5 ans n’avaient pas encore fréquenté un établissement d’enseignement préscolaire pour des raisons liées, entre autres, au genre de l’enfant et à ses atouts familiaux et sociaux. Ainsi, note le HCP, les parents s’avèrent plus favorables à la préscolarisation des garçons (51,1%) qu’à celle des filles (46,2%). Par ailleurs, quel que soit l’âge, le taux de préscolarisation des garçons est supérieur à celui des filles, de 6,3%, à l’âge de 3 ans et, de 10,5%, à l’âge de 5 ans. Ce sont généralement les ménages à taille réduite qui privilégient la préscolarisation. Les chances sont particulièrement minces chez les ménages à taille élevée. Un enfant issu d’une famille de moins de 4 personnes a deux fois plus de chance d’être préscolarisé qu’un enfant relevant d’un ménage de plus de 6 membres. De même, plus le nombre d’enfants dans le ménage augmente, plus les chances de préscolarisation se rétrécissent.
Un impact imminent sur le parcours scolaire
Comme partout dans le monde, témoigne le HCP, l’inégal accès au préscolaire se convertit en inégalités de chances vis-à-vis du succès scolaire, et, selon la théorie du capital social, en inégalités vis-à-vis du devenir social. Autrement dit, la préscolarisation améliore la trajectoire scolaire, du primaire au supérieur. En 2014, constatent les enquêteurs du HCP, la proportion des individus, âgés de plus de 24 ans, ayant achevé, à leur enfance, les études primaires et accédé, par la suite, au collège est de 58,9%. Elle est plus élevée parmi les préscolarisés (67,7%) que parmi les non préscolarisés (48,9%). Ce rapport de chances- s’élève avec le niveau scolaire. Il est de 1,7 fois pour l’accès au lycée et de 2 fois pour l’accès aux études supérieures, montrant l’impact réel de la préscolarisation sur la trajectoire scolaire.
Msid et koutab, des enseignements en recul
Selon le HCP, la préscolarisation améliore le capital humain national, en augmentant le nombre moyen d’années d’études et l’espérance de vie scolaire, deux variables décisives dans le calcul de l’indicateur du développement humain (IDH). Chiffres à l’appui, le nombre moyen d’années d’études d’un adulte qui a été préscolarisé (7,4 ans) est 2,3 fois celui de son homologue qui n’a pas été préscolarisé (2,7 ans). Une fois scolarisés, les non-préscolarisés accumulent un nombre d’années d’étude (7,4 ans) inférieur de près de 2 années à celui des individus qui ont été préscolarisés et scolarisés (9,3 ans). Enfin, sans surprise, le HCP souligne que le rendement du préscolaire traditionnel est, de loin, inférieur à celui du préscolaire moderne. Chose qui, aux yeux du HCP, explique la régression continue l’enseignement des Msid et Koutab depuis l’indépendance.
Wadie El Mouden