◆ Le foisonnement des écosystèmes a renforcé l’attractivité du pays dans le secteur automobile.
◆ La branche, pourvoyeuse de plus de 180.000 emplois, est le premier poste à l’export avec plus de 56,4 Mds de DH à fin septembre 2019.
Par Momar Diao
Le pays en quête d’un nouveau modèle de développement a d’énormes défis à relever en termes de diversification des secteurs productifs et de développement humain.
Toujours est-il que certaines stratégies sectorielles mises en place afin d’accélérer l’émergence du Royaume s’avèrent être payantes.
L’un des exemples les plus illustratifs est celui du développement des écosystèmes du secteur automobile, premier poste à l’export avec plus de 56,4 Mds de DH à fin septembre 2019. Cette branche du secteur secondaire est pourvoyeuse de près 180.000 emplois. L’objectif des 100 Mds de DH à l’export en 2020 est sur la bonne voie.
Les écosystèmes concernent, entre autres, le câblage, le métal et l’emboutissage, les batteries, l’intérieur des voitures et sièges. Les constructeurs PSA et Renault disposent de leurs propres écosystèmes.
Faudrait-il rappeler que le chemin parcouru a été long. Lors de la naissance des écosystèmes avec l’implémentation de Renault à Tanger, le constructeur français a démarré avec une capacité de production de moins de 100.000 unités par an. Aujourd’hui, les capacités de production cumulées de véhicules tendent vers 700.000 unités par an. Ce qui change foncièrement la donne en termes d’attractivité, que ce soit pour les équipementiers ou les constructeurs.
Qui de mieux pour se livrer à mesurer l’impact des écosystèmes sur le secteur si ce n’est les industriels à la tête des entreprises de la branche.
Regroupement autour d’objectifs communs
A la question de savoir quel a été l’apport concret des écosystèmes pour le décollage de l’industrie automobile au Maroc, Tajeddine Bennis, Directeur général de Snop au Maroc, spécialisée dans l’outillage de presse pour le secteur automobile rétorque : «Le premier point fondamental des écosystèmes a été le regroupement des acteurs et des métiers dans l’optique d’éclairer les pouvoirs publics sur les besoins et les problématiques spécifiques du secteur et des différentes branches, entre autres en termes de formation et de besoins de sous-traitance».
En clair, l’élaboration des écosystèmes dans le cadre du Plan d’accélération industrielle (PAI) porté par la tutelle a permis aux acteurs issus d’une même filière, au-delà des velléités concurrentielles, de mener de façon collective la réflexion sur les éléments susceptibles d’améliorer leur compétitivité.
Des résultats concrets
Les acteurs de l’emboutissage, consistant en la réalisation de composants de carrosserie à partir de bobines d’acier, avaient comme problématique majeure au Maroc le prix élevé de la matière première importée, en l’occurrence l’acier. Ce qui constitue une source de perte de compétitivité car la matière première représente entre 50 et 60% du prix de revient de la production. D’où l’enjeu pour les professionnels de trouver les mécanismes permettant de s’approvisionner au Maroc afin de réduire les coûts inhérents à l’achat de l’acier importé.
Un travail a été fait par les acteurs et Maghreb Steel afin de procéder à la validation technique de l’acier fabriqué par l’entreprise marocaine. L’analyse effectuée a montré que les besoins regroupés de la filière oscillent entre 500.000 et 600.000 tonnes par an. Ce qui constitue une aubaine de diversification de la clientèle pour Maghreb Steel.
Grâce au regroupement des acteurs dans le cadre des écosystèmes portés par la tutelle, l’outillage utilisé dans le secteur de l’emboutissage importé auparavant est produit au Maroc.
A cela s’ajoute la création de la nouvelle filière du traitement de surface pour certaines pièces automobiles à l’échelle nationale. Résultat des courses, aujourd’hui, le Maroc abrite deux grands leaders mondiaux de l’emboutissage (Gestamp et Proma).
Le cercle vertueux
«Il est vrai que pour certains, les écosystèmes attirent d’autres concurrents mais cela est de bonne guerre. Par exemple, la multiplicité des entreprises de l’emboutissage ou dans les autres branches incite d’autres constructeurs automobiles à s’installer au Maroc. Ce qui est bénéfique pour tout le monde car le gâteau à partager sera plus grand au niveau du business», analyse Bennis.
Pour ce qui est des retombées de l’installation de PSA au Maroc, pays qui dispose de près 10.000 ingénieurs évoluant dans le domaine de l’industrie automobile, notre interlocuteur explique : «L’ouverture de l’usine de PSA à Kénitra, avec une capacité de 200.000 unités par an et qui porte la capacité de production du pays autour de 700.000 unités, élargit la fenêtre d’opportunités de notre industrie», constate le dirigeant d’entreprise, fort d’une grande expérience dans le secteur automobile, aussi bien au Maroc qu’en France.
Pour rappel, Renault qui produit autour de 400.000 unités par an est dans une trajectoire de porter ce chiffre à 500.000. «L’atteinte de la taille critique de 700.000 unités par an avec l’arrivée de PSA ouvre la possibilité de bâtir une industrie locale spécialisée dans la construction de pièces capitalistiques. Ces dernières nécessitent un effort d’investissement important dont la rentabilité est assurée par un volume de production devant parfois être supérieur à 500.000 unités par an», assure notre interlocuteur.
Dans le même ordre d’idées, l’implantation de PSA a contribué à la naissance de nouveaux métiers qui n’existaient pas au Maroc, pour ne citer que la construction de jantes aluminium et la réalisation des systèmes de direction assistée.
De plus, la venue du constructeur français ayant eu un effet sur les volumes de production, a convaincu certains sous-traitrants étrangers d’acteurs locaux de s’installer au Maroc.