Outre l’aspect écologique, l’économie verte serait porteuse de création de richesse et d’emplois pour le Maroc.
A l’horizon 2020, certaines études tablent sur la création de 90.000 emplois, issus des quatre secteurs clefs de l’économie verte. En revanche, certaines voix s'élèvent pour alerter sur les contraintes et les risques générés par cette économie alternative, notamment pour la compétitivité des entreprises.
S’interroger sur les véritables capacités du Maroc à tirer profit de l’économie verte est d’autant plus opportun dans le contexte de la COP22 abritée dans la ville ocre. Aujourd’hui, nombreux sont les experts et les commentateurs qui joignent leur voix pour prôner la transition vers une économie verte ayant pour trame le bienêtre humain, l’équité sociale, la réduction des risques environnementaux et la pénurie des ressources. Le sujet de l’économie verte, qui s’appuie sur la production des énergies renouvelables et une meilleure efficacité énergétique, est autrement crucial pour le Maroc dépourvu de ressources pétrolières. Même si ces dernières années la facture énergétique a été moins salée en raison du net repli du prix du baril de pétrole, il n’en demeure pas moins que celle-ci continue d’être pénalisante pour la balance commerciale, les réserves de change et la liquidité des banques. Partant, la réduction de la dépendance énergétique du pays via le recours aux énergies renouvelables pourrait être bénéfique à l’économie nationale. Conscient de cet enjeu majeur, le Maroc a mis en place une stratégie énergétique nationale visant à porter la part des énergies renouvelables à 42% à l’horizon 2020, sachant que d’ici 2030, plus de la moitié de sa production d’électricité devrait provenir des énergies propres. L’implémentation de cette stratégie s’est traduite entre autres par le foisonnement des parcs éoliens (Tétouan, Essaouira, Tanger, etc.) et la mise en service en février dernier de la centrale solaire Noor I (Ouarzazate). Cela dit, la dernière étude du Conseil économique social et environnement (CESE) sur l’économie verte indique que les investissements projetés dans quatre secteurs clés de l’économie verte, soit un montant de 20 milliards d’euros, devraient permettre la création de 90.000 nouveaux emplois à l’horizon 2020. Ces quatre secteurs sont les énergies renouvelables, l’efficacité énergétique, la gestion des déchets solides et l’assainissement liquide. Dans le même ordre d’idées, soulignons que plusieurs études dont celle du ministère de tutelle, se sont employées à mettre en évidence les multiples opportunités de création d’emplois et de richesse offerte par cette économie alternative. Cela dit, certaines voix à l’instar de celle d’Azeddine Akesbi, professeur et économiste, s'élèvent pour nuancer les vertus précitées pour l’économie nationale.
Les risques sur la compétitivité des entreprises
Les plaidoyers des experts et des férus des énergies renouvelables portant sur la compétitivité du prix des énergies propres n’ont visiblement pas convaincu Azeddine Akesbi. «J’ai le sentiment qu’on va vite en besogne. Pour cause, le prix des énergies renouvelables, notamment celui du solaire, risque pendant des années d’être plus cher que celui des énergies classiques», assure-t-il. Et d’ajouter: «A l’évidence, cela pourrait avoir des répercussions sur la compétitivité de nos industries dans le cas où elles seraient amenées à utiliser ces énergies alternatives». Au-delà de ce volet digne d’intérêt, faudrait-il rappeler que l’économie verte est pourvoyeuse d’Investissements directs étrangers (IDE) pour le Maroc. En effet, les investisseurs étrangers et les bailleurs de fonds internationaux sont de plus en plus enclins à investir dans les grands projets d’infrastructures d’énergies propres. Par ailleurs, l’autre élément de nature à limiter les opportunités offertes par l’économie verte est la faiblesse de la structure du tissu industriel national qui se caractérise par la présence de peu de PME nationales spécialisées. D’où la nécessité de promouvoir un important tissu entrepreneurial dans les métiers des énergies renouvelables. Ce qui serait de nature à accélérer le taux d’intégration industrielle en la matière.
Pour ce qui est des projections des 90.000 nouveaux emplois créés à l’horizon 2020 par les quatre secteurs-clés de l’économie verte, Azeddine Akesbi demeure sceptique, tout en pointant du doigt l’exagération des chiffres. «En agrégeant les projections de créations d’emplois des différentes stratégies sectorielles, je me suis aperçu que le Maroc pourrait être amené à importer de la main-d’œuvre pour satisfaire ses besoins», alerte-t-il. En définitive, il est indéniable que l’économie verte peut être un vecteur de progrès économique pour le Royaume qui aspire à une croissance durable et verte. Toutefois, tirer profit de cette économie alternative suppose une meilleure stratégie nationale en la matière, qui de surcroît, doit être prise en compte dans les différents plans sectoriels, avec une réelle déclinaison régionale.
M. Diao
Satisfaire les besoins en compétences
Les hommes de Nizar Baraka alertent sur l’impératif d’adopter une attitude proactive afin de répondre aux besoins en compétences correspondants au programme de développement des filières industrielles vertes. Cela passe par une concertation entre les principaux acteurs (entreprises, établissements de formation, partenaires financiers). Concrètement, le Conseil économique social et environnemental (CESE) recommande entre autres, le développement des filières de formation des compétences marocaines et la promotion des initiatives de recherche-développement-innovation génératrices de brevets nationaux. Le soutien à la création de start-up dans les filières industrielles de l’économie verte et l’intégration de la dimension environnementale dans les programmes d’éducation à tous les niveaux font aussi partie des propositions du CESE.