Croissance : les voies de l’émergence ne sont pas impénétrables

Les voies de l’émergence ne sont pas impénétrables

 

 

Le Centre marocain de conjoncture (CMC) l’assure : l’économie marocaine a le potentiel de réaliser à horizon 2030 une croissance de 6,3% annuellement et de sortir de son ronronnement. Explications.

 

 

On ne le répètera jamais assez : une croissance de 4,5% du PIB demeure insuffisante pour permettre au Maroc d’emprunter le chemin de l’émergence. Ahmed Laaboudi, directeur général du CMC, rappelle à ce titre que la dynamique de croissance que connait le Royaume depuis quelques années (3,5% en moyenne durant la période 2011-2017) ne génère pas suffisamment d’emplois pour faire face à une population active qui connaitra pour de nombreuses années encore une forte expansion, comme le montre les projections de la pyramide des âges. L’économiste s’exprimait à l’occasion d’un point presse à propos de la publication par le CMC d’une étude intitulée «Maroc 2030, quelles voies d’émergence».

De même, sur le plan de l’inclusion sociale, les performances économiques ne contribuent que faiblement au recul de la pauvreté et à la réduction des inégalités.

Les projections établies par le CMC sur le revenu moyen par habitant, dans le cas où la croissance économique se maintiendrait sur ce trend, sont à cet égard édifiantes. «En 2030, si nous restons dans la même configuration, le revenu moyen par habitant passerait de 2.600 dirhams mensuel, à 4.000 DH mensuels, soit une élévation bien modique du niveau de vie», souligne l’économiste.

Pour relever le défi de l’émergence, le Maroc se doit de passer à la vitesse supérieure, c’est-à-dire enregistrer une croissance du PIB supérieur à 6%, et ce pendant plusieurs années.

Selon les économistes du CMC, le Maroc aurait les moyens de réaliser ce bond : «A la lumière des différentes simulations prospectives, le Maroc dispose de réelles potentialités pour s’engager dans une dynamique d’émergence, la seule capable de lui assurer, à terme, la convergence vers des standards de revenus et de niveau de vie plus avancés».

Le CMC s’est d’ailleurs prêté au jeu des différents scenarii de croissance à l’horizon 2030, du plus défavorable au plus otpimiste, en faisant évoluer 3 facteurs agissant sur l’offre à long terme : il s’agit de l’évolution de l’emploi potentiel établie à partir des projections démographiques, de l’intensité capitalistique et de la productivité globale.

L’étude de l’institution présidée par Habib El Malki tend à montrer que l’économie nationale dispose d’un potentiel de croissance important si elle parvient à mobiliser les facteurs agissant sur la dynamique productive sur le long terme.

 

Facteurs clés : intensité capitalistique et productivité

 

C’est le cas principalement de l’intensité capitalistique de l’économie marocaine. L’appareil productif du Maroc est en effet encore sous-équipé avec une intensité capitalistique relativement faible par rapport à la situation de nombreux pays comparables. Le CMC souligne que la structure de la formation de capital montre que près de 48% des investissements portent sur les produits du BTP contre seulement 38% pour les produits industriels. «La hausse de l’intensité capitalistique d’un point est, selon les résultats de nos simulations, susceptible d’induire un gain de croissance potentielle de 0,3 point», précise M’hamed Tahraoui, membre du comité scientifique du CMC.

L’accumulation du capital physique ne pourrait cependant être optimisée sans l’amélioration substantielle de la productivité, autre facteur clé pour l’émergence. «L’accroissement du rythme de productivité est susceptible d’engendrer des gains importants en moyenne sur la période de projection de la PGF (productivité globale des facteurs)  de 1,7% par an, observé durant les quinze dernières années, à 3% pour la période 2015-2030, porterait le taux de croissance à 7,3% par an», expliquent les analystes du CMC. De tels gains de productivité ne sauraient être atteints sans la mise en œuvre «de programmes de politiques économiques d’envergure avec comme objectifs l’amélioration de l’efficacité et des rendements de l’investissement, le développement du capital humain, le renforcement des infrastructures de base ainsi que la promotion de la R&D».

Si l’on ajoute à ces facteurs une évolution favorable de la demande mondiale, la croissance pourrait atteindre selon ce scénario 6,3% par an au cours de la période 2017-2030. Cela fait certes beaucoup de «si», mais l’étude du CMC a le mérite de poser de manière théorique les prérequis à une croissance forte inclusive et durable. Un tel rythme de croissance aura selon les économistes du CMC un impact significatif sur les revenus, les niveaux de vie et l’emploi. Ainsi, le taux de chômage dans ce scenario d’émergence pourrait diminuer à 7,5% à l’horizon 2030.

Si rien n’est fait dans ce sens, notre économie poursuivra son ronronnement : c’est-à-dire une croissance modérée autour de 4,3%, faiblement inclusive, incapable de résorber les déficits constatés au niveau de l’emploi, des finances publiques et du commerce extérieur. Et l’émergence restera une promesse.

 

A.E

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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