Créations d’emplois : Pourquoi le Maroc n’y arrive toujours pas

Créations d’emplois : Pourquoi le Maroc n’y arrive toujours pas

La formation professionnelle (FP) est davantage source de chômage pour ses diplômés que l’enseignement général


 

- Le Maroc a du mal à gérer les déséquilibres du marché du travail.

- La formation professionnelle est davantage source de chômage pour les diplômés.

 

 

Les programmes supposés promouvoir l’emploi, ainsi que les différentes dispositions inscrites en sa faveur dans le cadre des dernières Lois de Finances, ne semblent pas produire les effets escomptés.

Les derniers chiffres dévoilés cette semaine par le haut-commissariat au Plan (HCP) le montrent : le taux de chômage national est reparti à la hausse l’an dernier, s’établissant à 10,2% en 2017 contre 9,9% en 2016. A rappeler que le mode de calcul du taux de chômage est loin de faire l’unanimité auprès des analystes et des faiseurs d’opinion qui ont d’ailleurs, à tort ou à raison, émis à plusieurs reprises des réserves sur les chiffres annoncés, surtout quand ceux-ci étaient sous le seuil de 10%.

Les Lois de Finances successives ne cachent pas les difficultés du pays à gérer les déséquilibres structurels que connaît le marché du travail. Comprendre la situation revient à s’interroger sur les caractéristiques aussi bien du système productif qu’éducatif.

Du côté du système productif, l’économie nationale se caractérise par des taux de croissance relativement faibles, qui varient au gré de la clémence du ciel.

Bon an mal an, le taux moyen de croissance oscille autour de 3,5% et crée peu d’emplois (70.000 postes en moyenne annuelle entre 2008-2015), par rapport aux besoins, estimés annuellement à 350.000 postes.

C’est dire si la viabilité du modèle économique actuel est remise en question à cause de son inefficacité en matière de croissance inclusive.

La deuxième particularité de notre économie est l’existence d’un secteur de l’informel hypertrophié. Sa principale caractéristique est qu’il emploie peu de personnel qualifié, formé ou diplômé. Les dernières statistiques du HCP donnent un chiffre de 7 emplois sans qualification sur 10 créés. Autrement dit, les postes d’emplois générés pour le personnel diplômé demeurent bien insuffisants au sein de cette masse de création d’emplois.

 

 

 

Du côté de l’éducation et de la formation, plusieurs points noirs subsistent. Le maigre bilan des réformes successives montre qu’aussi bien sur le plan qualitatif que quantitatif, il y a de sérieux problèmes. Malgré les moyens considérables déployés, notamment sur le plan budgétaire, l’investissement en capital humain ne semble pas produire la valorisation escomptée de cette ressource. Le constat est sans appel : notre système éducatif ne prépare pas les jeunes citoyens à l’initiative, à la communication et à d’autres compétences indispensables à la vie professionnelle.

 

La formation professionnelle : la planche de salut ?

 

Contrairement aux idées reçues, la formation professionnelle (FP) est davantage source de chômage pour ses diplômés que l’enseignement général. «Tout le monde s’accorde à dire que notre système d’enseignement doit être amélioré en termes de rendement interne et externe, indiquant que la grande réforme de ce secteur est aujourd’hui imminente. Il y a cependant lieu de poser d’une manière peut-être plus exigeante le cas de la formation professionnelle qui constitue dans le consensus public le remède magique du décollage économique, au point de la dispenser de toute évaluation exigeante de son coût et de ses résultats», alerte le haut-commissaire au Plan, Ahmed Lahlimi.

Des propos qui ne sont pas anodins et qui sont étayés par les chiffres. Les lauréats de la FP ont plus de difficultés à intégrer le marché du travail que ceux de l’enseignement général. Ils enregistrent des taux de chômage respectifs de 24,5% et de 16%. Pis encore, lorsqu’ils sont embauchés, les lauréats de l’OFPPT rentrent déclassés. «33% contre 11% de ceux issus de l’enseignement général occupent des postes en déclassement par rapport à leur qualification», apprend-on dans une note récente du HCP.

Des chiffres qui ne manquent pas de surprendre, car ils remettent en cause l’efficacité de la formation professionnelle, tant vantée par les pouvoirs publics.

 

Modèle économique : la démesure des inégalités

 

Il y a quelques mois, le gouvernement a reconnu la nécessité de repenser le modèle économique actuel, en raison des écueils qui en grèvent la pertinence, particulièrement en matière de création d’emplois.

Comme expliqué par l’économiste Azzedine Akesbi, la stratégie nationale de l’emploi, sous ses multiples facettes, souffre de l’absence de mécanismes pour réduire le chômage. La levée des contraintes est à rechercher dans l’intensification des efforts en matière d’investissement dans les infrastructures et dans le capital humain. Elle l’est également, comme souligné par les institutions que ce soit le HCP ou la Banque mondiale, dans la réalisation d’un taux de croissance de 6 à 7%. ■

 

 

Incitations fiscales accordées dans le cadre de Tahfiz

 

Parmi les mesures d’encouragement et de soutien à l’emploi et d’amélioration de la compétitivité des entreprises, les dispositions de l’article 57-20° du CGI prévoient l’exonération de l’Impôt sur le revenu (IR) au titre du salaire mensuel brut plafonné à 10.000 DH. Cet avantage est accordé, sous réserve du respect de certaines conditions, pour une période de 24 mois à compter de la date de recrutement du salarié.

Afin de renforcer le caractère incitatif de ce dispositif, la LF n°68-17 précitée a modifié les dispositions de l’article 57-20°, en améliorant les avantages fiscaux accordés comme suit :

• Relèvement du nombre d’employés dont le salaire est éligible à l’exonération, de 5 à 10 salariés;

• Extension de l’application de ce dispositif à toutes les entreprises, associations ou coopératives créées pendant la période allant du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2022… ■

 

 

Par Soubha Es-siari

 

 

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