Le département de tutelle veut changer les règles qui encadrent l'urbanisme dans les zones rurales afin de faciliter et d'améliorer les procédures en la matière. L’absence d’un cadre juridique adéquat a encouragé l’habitation anarchique.
Le projet de décret destiné à faciliter l'accès à la construction en milieu rural sera fin prêt incessamment. Ce projet, en cours de réalisation en partenariat avec d'autres départements ministériels, vise à offrir un cadre de vie adéquat et des perspectives meilleures à la population en milieu rural. «C’est un décret fortement attendu par les promoteurs, les citoyens et les communes rurales. L’insuffisance des règles et lois en la matière, en l’absence d’un cadre juridique adéquat, a donné libre cours à l’informel et aux constructions anarchiques qui ont flambé ces dernières années», souligne Mohamed Alaoui, expert en immobilier. En effet, le département de tutelle oeuvre à changer les règles qui encadrent l'urbanisme dans les zones rurales afin de faciliter et d'améliorer les procédures en la matière. C’est un dossier qui a été traité en urgence par Driss Merroun, nommé, lors du dernier remaniement gouvernemental, ministre de l'Urbanisme et de l'Aménagement du territoire national, à la place de Mohand Laenser. Le développement rural est un ensemble d'actions convergentes qui comprennent particulièrement le logement, les services sociaux, l'enseignement, la santé et le développement agricole. Il est donc opportun que les constructions répondent aux différents besoins. «Si les villes connaissent un certain essoufflement dans le domaine de la construction ces derniers temps, le monde rural présente des potentialités importantes pour les professionnels. La demande dépasse nettement l’offre car les investisseurs n’ont pas de visibilité et les communes n’ont ni les éléments juridiques, ni les moyens requis pour accorder suffisamment d’autorisations», souligne Mohamed Bendhiba, promoteur à Tit Mellil, relevant de la préfecture de Médionua. Il faut noter que toute la politique de l’Etat au niveau du secteur de l’habitat est focalisée sur les villes. Il est question de remédier à l’habitat insalubre, en dopant l’offre du logement social pour satisfaire d’autres couches de la population. Pour le milieu rural, il n’existe aucun programme de grande envergure. Pour garder l’aspect agricole des terres en milieu rural, la loi a interdi tout morcellement de moins d’un hectare, soit 10.000 m2. C’est la superficie minimum pour construire un logement ou des bâtiments d’exploitation. Le coût d’acquisition d’une telle surface est inaccessible pour une bonne partie de la population. En revanche, il n’y a pas de produits dédiés à cette même population. Même les appartements à 140.000 DH ne sont disponibles que dans quelques zones très limitées. Face à cette situation, les ruraux n’ont d’autres choix que l’habitat clandestin ou le logement social, ce qui accentue davantage l’exode vers les villes. Une telle situation n’a fait qu’empirer; des villes fantômes ont proliféré d’une façon insoutenable dans les périphéries. Des quartiers, voire des petites villes comme Lahraouiyine, Douar Tkalya, Chellalat et autres…, ont poussé dans un laps de temps record, aidés en cela par la complicité de certains présidents ou conseillers de communes qui pour des besoins électoraux ont fermé l’oeil. Le phénomène est presque identique à d’autres grandes villes. Techniquement, plusieurs difficultés et contraintes pénalisent le secteur. «C’est difficile de réaliser les constructions dans les règles de l’art dans le monde rural. Il est question de respecter les conditions de sécurité auxquelles elles doivent satisfaire dans l’intérêt de l’hygiène, de la circulation, de l’esthétique et de la commodité publique. Il faut respecter également les conditions d’aération, les droits de voirie. Il s’agit aussi de se conformer aux exigences en matière d’assainissement et d’approvisionnement en eau potable», explique Hassan Kamih, architecte. Dans le monde rural où l’autoconstruction domine, pour des raisons budgétaires, les investisseurs ne suivent que partiellement ces recommandations. Le projet de décret est un pas pour mettre fin à l’anarchie ambiante. Il permettra aussi aux communes rurales de réaliser des lotissements et autres projets d’habitations adaptés aux besoins de la population.
Charaf Jaidani