Artisanat: le Maroc veut assurer la relève par la jeune génération

Artisanat: le Maroc veut assurer la relève par la jeune génération

La transmission des savoir-faire liés à l’artisanat aux jeunes générations est la priorité numéro 1 du projet de sauvegarde et valorisation du patrimoine culturel immatériel. ◆ Les exportations de l’artisanat marocain ont connu une croissance de 36% à fin février 2023 par rapport à la même période en 2022

 

Par M. Boukhari

Depuis la nuit des temps, le Royaume se distingue par des joyaux artisanaux qui lui valent une reconnaissance à l’échelle mondiale. L’habit traditionnel, les bijoux, le zellige, les tapis et la poterie… ce sont quelques produits qui font la richesse de l'héritage culturel marocain. A l’instar d’autres secteurs, celui de l’artisanat traverse une mauvaise passe. En raison de la hausse des prix des matières premières et de la contrefaçon qui gagne de plus en plus de terrain, plusieurs métiers liés à l’artisanat sont aujourd’hui menacés de disparition. Une triste réalité qui déplait fortement aux artisans qui chérissent tant cette profession et aspirent à des jours meilleurs.

Confirmant cet état de fait, Mohammed Ait Yachou, président de l’Instance nationale des artisans et de l’industrie artisanale, précise que les principaux problèmes dont souffre le secteur de l’artisanat sont ceux de l’explosion des cours mondiaux des matières premières et la pénurie criante de main-d'œuvre. Il assure également que les jeunes d’aujourd’hui «accordent peu d’importance à la démarche qualité et ne sont pas curieux d’apprendre de fond en comble les caractéristiques des produits, leur provenance, leur composition ainsi que les différentes techniques de marketing susceptibles de contribuer à leur promotion».

Mohammed Ait Yachou reste par ailleurs convaincu que dans plusieurs filières artisanales, l’autonomisation et les machines ont remplacé le travail manuel. Ce qui, selon lui, n’est pas sans altérer le processus créatif et artistique par lequel devrait passer le produit en temps normal. «Ceci a un impact considérable sur la qualité et l’image qu’on renvoie de notre produit national à l’international», affirme-t-il.

 

Ammor à la rescousse

La ministre du Tourisme, de l’Artisanat et de l’Economie sociale et solidaire, Fatim-Zahra Ammor, a présidé récemment la première réunion du comité de pilotage du projet de sauvegarde et valorisation du patrimoine culturel immatériel, lié à l’artisanat marocain avec l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco). Ledit projet s’inscrit dans le cadre de l’accord signé entre le ministère et l’Unesco en novembre 2022.

Ce dernier vise la mise en place d’un système durable de transmission des savoir-faire liés aux métiers de l’artisanat et menacés de disparition. «En tant que professionnels soucieux du développement de ce secteur, cette initiative ne peut que nous réjouir, surtout que plusieurs métiers de l’artisanat sont actuellement en voie de disparition. Et cela se déroule à une telle vitesse qu’il est plus que jamais nécessaire d’engager des mesures drastiques afin de ressusciter cet héritage immatériel si cher à nos cœurs», dixit le président de l’Instance nationale des artisans et de l’industrie artisanale.

 

Transmission intergénérationnelle

Parmi les raisons qui font que plusieurs savoirs et savoir-faire liés aux métiers de l’artisanat marocain courent aujourd’hui le risque de disparaître, il y a la non-transmission de ces savoirs aux jeunes générations par les maîtres artisans. A cet effet, la réunion tenue par la ministre a marqué le coup d’envoi du projet «Sauvegarde des savoirs et des savoir-faire menacés de disparition et liés à l’artisanat à travers leur transmission aux jeunes générations», ainsi que la validation du processus de transmission et de sélection des artisans détenteurs des savoirs et savoir-faire menacés de disparition qui auront le titre de «Trésors des arts traditionnels marocains».

Dans une première étape, six savoirs et savoir-faire traditionnels menacés de disparition ont été ciblés lors de ce comité de pilotage. Il s’agit de la blousa oujdia, des selles brodées, de la lutherie, du zelige de Tétouan et du tissage des tentes. En ce qui concerne les étapes ultérieures, celles-ci porteront sur l’identification de 6 maîtres artisans détenteurs de ces savoir-faire et la transmission de leur savoir à des jeunes apprentis à travers des programmes de formation spécifiques. Ce programme sera par la suite généralisé pour couvrir 30 savoirs et savoir-faire menacés de disparition. Outre le projet de sauvegarde, Mohammed Ait Yachou suggère l’organisation d’un programme national pour la formation et la sensibilisation aux métiers de l’artisanat.

«Inspirons-nous de ce qui se fait par exemple en Europe ou en Asie, où on témoigne une volonté manifeste des autorités à œuvrer à la promotion desdits métiers à travers la mobilisation des ressources financières, en plus d’apporter le soutien moral nécessaire aux nouveaux apprenants», déclare-t-il. Et de poursuivre : «Certains pays consacrent 10% de leur budget à l’achat des produits de l’artisanat pour préserver cet héritage culturel, encourager l’entrepreneuriat et améliorer les conditions de travail des professionnels». Pour rappel, au Maroc, le secteur de l’artisanat participe à hauteur de 7% du PIB et emploie 2,4 millions de personnes. Les exportations ont connu une croissance estimée à 36% à fin février 2023, par rapport à la même période en 2022. 

 

L'artisanat marocain à l’honneur en Italie
Pour la première fois, l’artisanat marocain s’est invité à Milan en marge du prestigieux «Salone Del Mobile» qui s’est tenu du 18 au 23 avril. Cette manifestation est considérée comme la plus importante du monde du meuble et du design. Une participation qui vient conforter la dynamique soutenue enregistrée par les produits de l’artisanat marocain sur les marchés extérieurs. Accompagnées par le ministère et la Maison de l’artisan, dix-sept entreprises marocaines ont porté les couleurs du Maroc à Milan. Les maîtres-artisans et designers marocains ont exposé leurs produits collectivement dans un pavillon de près de 200 m2, conçu par le designer Hicham Lahlou.

 

 

 

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