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Entretien : «Nous avons besoin d’une approche holistique pour réduire les risques dans notre société»

Entretien : «Nous avons besoin d’une approche holistique pour réduire les risques dans notre société»

Dans le cadre du lancement américain, avec le Washington Times, du livre «Harm Reduction : The Manifesto», publié par les Éditions Orion, docteur Imane Kendili, psychiatre et écrivaine, se livre à nous dans une interview révélatrice.

 

Propos recueillis par Abdelhak Najib

Finances News Hebdo : La pandémie du Covid-19 a montré à quel point nous avons besoin de penser la question de la «Réduction des risques» dans le monde d’aujourd’hui. C’est ce que vous avez essayé d’expliquer dans votre ouvrage collectif, intitulé : «Harm Reduction : The Manifesto», qui a été lancé aux USA, avec le Washington Times, le 26 janvier 2022 ?  

 

Imane Kendili : Tout à fait. Notre ouvrage collectif est le premier de son genre au monde qui pose la question de la réduction des risques dans sa globalité en impliquant 26 auteurs de 9 pays différents, des cinq continents, pour apporter des lectures en profondeur de la gestion des graves crises pas seulement sanitaires, mais humaines, partout dans le monde, aujourd’hui. Cette version anglaise, qui vient compléter la version française, lancée en juin 2021, est sortie en avant-première aux USA, plus précisément à Washington DC, avec le concours du très sérieux Washington Times. Un lancement américain qui a fait l’objet d’un webinar en direct de Casablanca et de Washington DC, avec un Talk-Show en direct et une couverture médiatique à la hauteur du livre et de l’événement.

Sur un autre niveau, en effet, la grave crise sanitaire liée au Covid-19 nous a permis de revoir toutes nos cartes dans nos différentes stratégies politiques, sociales et économiques, au niveau des autorités et des gouvernements pour mieux faire face à ce danger qui a déjà tué plus de 5 millions de personnes touchant plus de 300 millions de cas dans le monde. Cette crise nous a également montré que nous avons besoin de plusieurs stratégies à mettre sur place pour mieux lutter contre ce type de risques sanitaires, qui vont se répéter dans le futur, qui vont devenir de plus en plus chroniques et qui nécessitent une autre manière de régir faisant une lecture holistique de toutes les complexités que cela implique. On l’a bien vu, il n’y a pas de solution miracle. Des États puissants ont été mis en échec face au Coronavirus. Regardez ce qui se passe justement aux USA, le pays le plus touché dans le monde. Par contre, d’autres pays plus pauvres, comme c’est le cas en Afrique, ont mieux géré la crise, d’abord grâce à leur capacité de résilience, ensuite grâce à des mesures draconiennes qui ne laissent aucune chance au hasard. L’une des grandes leçons de cette grave crise sanitaire est que nous n’étions pas préparés pour répondre efficacement à ce virus. D’où l’urgence de réfléchir tous ensemble à des solutions sérieuses qui anticipent le danger et qui impliquent toute la communauté mondiale, s’appuyant sur les différentes expériences au niveau de chaque pays.

 

F. N. H. : À qui est destiné cet ouvrage collectif qui réunit 26 auteurs et 9 nationalités ?

I. K. : Il est destiné d’abord aux différents départements gouvernementaux pour leur proposer des solutions. Ensuite, il est destiné à un large public, allant des médias aux spécialistes et autres analystes et chroniqueurs pour leur donner une plate-forme d’informations, dans divers domaines, pour relayer l’information et sensibiliser les populations, à travers la télévision et les différents médias. C’est un livre destiné également aux médecins traitants, chacun dans sa spécialité, pour avoir une idée sur quelle approche nous devrions mettre en place dans notre gestion des risques qui nous menacent. Il est aussi destiné aux étudiants qui y trouvent de bonnes références pour leurs thèses et leurs travaux faisant de la question de la réduction des risques une matière à introduire dans les écoles et les universités pour une gestion globale de cette question très complexe.

 

F. N. H. : Parlez-nous des mesures prises en ce qui concerne la lutte contre les drogues et la prévention contre les changements climatiques ?

I. K. : Les différentes pistes apportées par le livre, par exemple en termes de lutte contre l’usage des drogues, partent du principe qu’il nous faut, au niveau de chaque État, mettre en place une véritable politique de prévention et de lutte contre tous les types de drogues. Cela implique plusieurs départements : la santé, avec la création d’unités de soins dédiées à la lutte contre les addictions, avec des spécialistes et des accompagnateurs qui travaillent au quotidien avec les addicts pour les aider à tourner la plage des drogues et s’orienter vers des projets de vie loin de toute addiction. Mais aussi la police qui doit traquer les trafiquants de drogues qui ont pignon sur rue, la justice qui doit condamner les trafiquants et aider les consommateurs en les soumettant à des soins spécialisés pour s’en sortir, sans oublier la sensibilisation dans les écoles pour éviter à une population jeune de tomber dans le piège des drogues comme c’est le cas aujourd’hui, partout dans le monde.

En ce qui concerne les risques liés au changements climatiques, notre idée est claire : il nous faut mettre sur pied une stratégie offensive pour la protection des ressources naturelles, de protection de la faune et de la flore, de la protection des nappes phréatiques, des cours d’eau, des rivières et des océans, de protéger les biotopes, de réduire les émanations des gaz à effet de serre en privilégiant une énergie verte et renouvelable, comme l’énergie solaire, l’énergie éolienne, des cultures biologiques sans insecticides ni pesticides, le tout adossés à des programmes de sensibilisation écologiques par médias interposés.

 

F. N. H. : Qu’en est-il de la réduction des risques et de l’usage du tabac aujourd’hui ?

I. K. : Nous avons un long chapitre dans le livre qui traite profondément de cet aspect en apportant de véritables éléments de réponse. D’abord, il est urgent que la question du tabac soit l’objet d’un débat national, non seulement au Maroc, mais partout dans le monde, au vu des statistiques et du nombre de décès dus aux différents cancers causés par la cigarette. Dans ce sens, il y a des alternatives comme la cigarette électronique, en précisant quels choix de produits les consommateurs doivent privilégier pour éviter tous les risques liés également à ce type de produits qui présentent des dangers et de nombreux effets secondaires que nous avons bien détaillés dans le livre pour éviter toute confusion et tout amalgame. Le tabac tue des millions de personnes par an. La cigarette électronique a montré toutes ses limites. Quelles perspectives pour lutter avec efficacité contre ce type de danger ? Tout comme les autres types de drogues, l’alcool, le cannabis, les drogues dures, cocaïne, héroïne, ecstasy, amphétamines…etc. Dans le livre, nous avons abordé toutes ces addictions dans des analyses pointues qui vont au fond des choses pour apporter des réponses viables et fiables.

 

F. N. H. : Qu’en est-il de la sensibilisation en termes de réduction des risques aujourd’hui ? 

I. K. : Il y a un vide énorme au niveau de la sensibilisation qui doit être globale à tous les niveaux. Nous avons besoin des médias pour en parler en posant les bonnes questions et en essayant d’apporter des réponses pour que les populations soient bien informées sur les dangers et les risques qu’elles encourent. Cela doit passer par des programmes de sensibilisation à la télévision, sur les ondes des radios, sur Internet, sur les plateformes des réseaux sociaux, dans des forums de discussion pour permettre à chacun de se faire une idée sur les dangers et les risques auxquels nous devons faire face.

 

F. N. H. : Un mot de la fin ?

I. K. : La pandémie du Covid-19 nous a montré clairement que les différents États se sont trompés de cible en ce qui concerne la croissance économique qui n’a pas inclus la prévention des risques qui peuvent handicaper cette même croissance économique, comme c’est le cas aujourd’hui. Dans ce sens, les gouvernements devraient miser sur la recherche médicale et scientifique, et ce dans tous les domaines. C’est bien beau de vouloir aller sur Mars, mais il est certainement plus intelligent de s’occuper d’abord des graves problèmes de la terre que l’argent seul ne peut résoudre. La preuve en est que les pays les plus riches sont ceux qui ont été frappés lourdement par le Covid-19 : les USA, la Russie, l’Inde, la Chine, le Brésil, l’Allemagne, le Royaume-Uni, la France, l’Italie, l’Espagne…etc. Dans ce sens, ce qu’il ne faut pas faire et répéter comme erreur est d’investir des billions de dollars dans l’industrie militaire au lieu d’investir cet argent dans la santé et la recherche scientifique pour trouver des solutions viables et fiable pour une humanité tenue en échec par un virus qui a montré à quel point le monde est fragile et vulnérable.

 

 

«Harm Reduction : The Manifesto», aux Éditions Orion. 450 pages. Disponible en librairies et aux éditions Orion.

 

 

 

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