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Coronavirus : Le monde d’après

Coronavirus : Le monde d’après

Tandis que la pandémie bat son plein partout dans le monde, les spéculations sur l’après vont bon train. Les uns se figurent l’apocalypse, les autres imaginent un monde meilleur à inventer.

 

Par R. K. H.

 

Dans un édito paru récemment dans le quotidien Libération, Alexandra Schwartzbrod écrivait «l’heureuse surprise de cette crise sanitaire : l’Afrique (…) Personne n’a pour l’instant d’explication certaine à ce miracle africain (…) Ce qui est sûr, c’est que l’Afrique est en train de donner des leçons au reste du monde». Le Maroc peut s'enorgueillir d'être l'un des pays qui ont fait face et a pu gérer cette situation à la fois délicate et inédite.

Ceci dit, la menace d’une autre vague de Covid plane toujours, même si mettre fin à soixante jours de confinement pour trentesix millions d’habitants est ardemment souhaité. On n’est pas épargné, tant que les indicateurs de propagation du virus n’affichent pas vraiment une baisse. On va devoir vivre avec pendant des mois, car l’épidémie ne va pas s’arrêter après le déconfinement.

Dans les faits, «on ne se sent toujours pas en sécurité», s’angoisse un jeune homme. Pour lui, cette date du 20 mai ne marque pas la fin du «cauchemar», bien au contraire. Tandis que la pandémie bat son plein partout dans le monde, les spéculations sur l’après vont bon train. Les uns se figurent l’apocalypse, les autres imaginent un monde meilleur à inventer.

En temps de crise, l’imagination, dopée par l’angoisse, est fertile et elle échafaude volontiers des scénarios de changement. Après le confinement, certains comportements resteront bien vivants, tandis que d’autres disparaîtront. Certains traverseront le temps, d’autres seront perdus dans l’oubli. Il faudrait trancher entre ce à quoi nous tenons et ce que nous voulons au contraire arrêter, afin de réinventer nos façons de vivre.

Un monde, en «un peu pire»…

Michel Houellebecq, dans une lettre envoyée à la radio France Inter, ironise tout d'abord sur ce fameux Covid-19 : «Un virus banal, apparenté de manière peu prestigieuse à d’obscurs virus grippaux, aux conditions de survie mal connues, aux caractéristiques floues, tantôt bénin tantôt mortel, même pas sexuellement transmissible : en somme, un virus sans qualités». Elle aurait pu être parfaite, si l’auteur s’était défait de sa misanthropie pathétique, désencombré de sa fâcheuse habitude d’évoquer à chaque fois le sexe.

Toujours est-il que Houellebecq livre une chronique savante et ironique, qui vient à point nommé dégonfler tout fantasme d’un monde nouveau, en nous montrant que, jusque dans l’après, aucun homme n’est à l’abri du pire.

«Je ne crois pas une demi-seconde aux déclarations du genre rien ne sera plus jamais comme avant. Au contraire, tout restera exactement pareil», explique-t-il. Mieux, le coronavirus, selon lui, va «accélérer certaines mutations en cours» et «une tendance lourde : une certaine obsolescence qui semble frapper les relations humaines».

Bref, conclut Michel Houellebecq, «nous ne nous réveillerons pas, après le confinement, dans un nouveau monde; ce sera le même, en un peu pire». Un monde beaucoup plus intéressant, complexe, tourmenté, contradictoire, sympathique même que ne pourraient le supposer ceux, nombreux, à qui - volontairement peut-être - il donne de l’urticaire.

C’est une illustration assez belle de ce désespoir tonique qui ne peut être qu’un moteur profond de l’existence. Qui veut se jeter en avant ferait bien de jeter un œil derrière lui. Dans le monde d’avant régnait l'une des plaies fâcheuses des sociétés : l’injustice. Elle se traduisait d’abord, par l’inégalité des citoyens devant la justice. Le puissant en sort toujours blanchi, l’homme de modeste condition est systématiquement condamné. Elle est liée au clivage entre les riches et les pauvres.

Plus les uns s’enrichissent, plus les autres s’appauvrissent, d’autant que les premiers y parviennent aux dépens des seconds. Ce qui provoque une fracture sociale, dommageable pour la cohésion sociale.

Tendres espoirs

«Nous ne reviendrons pas à la normale parce que la normalité était le problème» : tel est le slogan affiché il y a quelques semaines sur un immeuble de Santiago par des opposants au gouvernement néolibéral chilien, ce slogan a tout pour convaincre. Il faut en effet reconnaître que ce monde n’avait rien de «normal».

C’est ici qu’il vaut peut-être la peine de se demander ce qui, du monde d’avant, doit être abandonné et ce qui, malgré tout, mérite d’être préservé. Comme si on avait vraiment le choix... Il est toujours permis de rêver

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